Magazine Humour

Harcèlement

Par Anaïs Valente

Je déteste le téléphone.
Je ne parviens d’ailleurs plus à comprendre comment, durant toute mon adolescence, j’ai pu être raide amoureuse de cet appareil et passer mes soirées à discuter avec les copines que j’avais vues durant toute la sainte journée à l’école.
Est-ce parce qu’actuellement, la journée, je passe beaucoup de temps au téléphone, rarement pour des appels agréables : entre les clients qui râlent et ceux qui … râlent, il y a peu de place pour les rires et la joie.
J’ai donc opté pour l’affichage de l’appel ET l’affichage de l’appelant, histoire d’avoir des soirées peinardes et de pouvoir filtrer les appels.
J’ai donc droit à plusieurs types d’appels :
-    l’appel clairement identifié avec numéro et nom, que je décroche dans 99 % des cas, le 1 % restant représentant l’abstention indispensable durant les quotidiennes Star Ac, les pauses pipi, Docteur House, Newport Beach, les Experts, Greys Anatomy, Prison Break...
-    l’appel du bureau (dingue comme ils ont toujours besoin de moi lorsque je preste mon temps partiel en m’offrant une petite sieste devant un DVD)
-    l’appel anonyme, généralement en provenance de commerciaux qui tentent de me fourguer qui une bouteille de vinasse, qui un abonnement adsl, qui un canapé cuir, alors que je suis célibataire et que je ne correspond donc pas à la cible type, savoir la ménagère de moins de cinquante ans (cf ce billet http://le-celibat-ne-passera-pas-par-moi.skynetblogs.be/post/3951140/celibat-et-telephone--incompatibles-)
Ainsi, lorsque mon téléphone a sonné à 16h57 et que mon appareil magique m’a indiqué « onbekend/inconnu » (ouiiiiiiiiii, il est bilingue mon appareil, la classe), je n’ai pas décroché.
Lorsqu’il a sonné à 17h18 et m’a à nouveau indiqué « onbekend/inconnu », j’ai persisté.
Lorsqu’il a sonné à 17h24, toujours avec le même message, j’ai commencé à m’inquiéter (et si c’était un hôpital – les centrales téléphoniques étant parfois « anonymes »  - qui insiste car un drame s’est produit, et si c’était un grand magazine parisien qui veut me proposer une offre sidérante, et si c’était un amoureux transi qui est à ma porte avec un bouquet de fleurs ?).  Mais j’ai encore persisté.
Lorsqu’il a à nouveau sonné à 17h28, je me suis dit que le laps de temps entre chaque appel diminuait dangereusement et que la situation devait être grave.  Mais j’ai résisté et je n’ai pas décroché.  Mais l’angoisse me tenaillait l’estomac : le drame s’était transformé en cataclysme, le grand magazine parisien allait contacter quelqu’un d’autre, j’allais rater l’amour de ma vie.
Lorsqu’il a sonné encore à 17h33, j’ai abandonné la lutte et j’ai finalement décroché.
Pour entendre une voix féminine peu enthousiaste me susurrer : « bonjour Médééééééme Valente, ici Télé 2 (opérateur de téléphonie, pour ceusses et celles qui l’ignorent), j’ai une proposition à vous faire… »
Enragée d’avoir à nouveau été bernée par ces commerciaux dignes des pires harceleurs que l’humanité a produits, j’ai répondu sèchement « je ne suis pas intéressée » (il fut un temps où j’expliquais en long et en large les raisons de mon désintérêt, mais depuis que j’ai compris que ça ne les intéressait pas non plus, j’ai décidé d’épargner ma salive).
Elle a tenté de placer un « Mais… », que j’ai immédiatement interrompu d’une voix furieuse « c’est vous qui n’arrêtez pas de m’appeler depuis tout à l’heure ? »
Sur ce, elle a compris que le travail de persuasion serait long et difficile, sinon impossible, et elle m’a sauvagement agressée « oui c’est moi, mais je ne comprends pas pourquoi vous dites ne pas être intéressée, je ne vous ai encore rien proposé… »
C’est vrai quoi Anaïs.  Cette femme est commerciale chez Télé 2.  Tu ne pouvais deviner pourquoi elle t’appelait, voyons Anaïs.  Si ça tombe, elle allait te proposer un séjour à Disneyland Paris à prix riquiqui, une nouvelle cuisine équipée, tes courses gratuites durant un an, une écharpe Strelli gratuite livrée à domicile…  M’enfin Anaïs !

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