Le 13/09/2022 :
Fichage génétique : La moitié des français sont épinglés
Le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (Fnaeg) vient de publier son dernier recensement. Avec plus de 35 millions de Français fichés sur 69 millions, la barre symbolique des 50% est atteinte.
Une société à deux vitesses
La Ligue des Droits de l'Homme a aussitôt réagi : « l'extension et la déréglementation tout azimut du fichage génétique a créé une société à deux vitesses ». Alors que certains sont triple-fichés pour pauvreté, origine ethnique et convictions politiques, d'autres agissent en toute impunité. Pour exemple, la délinquance financière ou délinquance en "col blanc" n'est toujours pas un critère d'inscription au Fnaeg. Un Fnaeg que la Ligue accuse d'être devenu une « véritable passoire ». De plus en plus d'entreprises, moyennant contacts et pots de vin, ont accès au fichier et à des informations confidentielles sur leurs employés. Sans compter que les dérapages policiers se sont multipliés depuis 10 ans. Perdre un cheveu sur la scène d'un crime à venir peut valoir une garde à vue de 72 h. Voir… une condamnation en comparution immédiate ! Mais le plus problématique reste que les empreintes génétiques sont réputées infaillibles. Une fausse réputation, qui induit régulièrement les jurés en erreur. Pour la Ligue, il devient urgent de rétablir l'égalité entre les citoyens. La solution ? « Etendre le Fnaeg à l'ensemble de la population et rendre ces informations publiques ». Mais d'après le collectif Refus ADN, qui organise depuis 20 ans la désobéissance civile, « le remède serait pire que le mal ».
Seule touche d'espoir dans ce tableau bien sombre, l'Inserm, le CNRS et trois industries pharmaceutiques ont, depuis le 26 janvier dernier, l'autorisation d'utiliser la base de données du Fnaeg pour la recherche médicale.
Quelques dates clefs :
1998 : Création du Fnaeg dans le cadre de la loi sur la répression des infractions sexuelles.
2001 : Loi sur la sécurité quotidienne. Extension du Fnaeg aux crimes d'atteintes graves aux personnes.
2003 : Loi pour la sécurité intérieure. Extension à presque tous les crimes et délits. Fichage des suspects en plus des condamnés.
2007 : Amendement à la loi sur l'immigration autorisant le recours à des tests ADN lors d'un regroupement familial.
2010 : Le Conseil d'Etat autorise l'ajout de l'identité génétique des étrangers en situation irrégulière aux informations du fichier Eloi.
2010 : Simplification des démarches pour le fichage génétique : l'inscription au Fnaeg peut se faire sans l'intervention d'un magistrat et dès l'arrivée en garde à vue.
2012 : Suppression de l'article 16-11 du code civil limitant le Fnaeg aux procédures judiciaires.
2012 : Toute inscription au Fnet, le Fichier national des enfants turbulents, est associée à une inscription au Fnaeg.
2017 : Loi anti-terroriste « Risque 0 ». Les français d'origine immigrée de première et seconde générations doivent s'enregistrer au Fnaeg.
2017 : Loi sur le respect de l'Identité nationale et de la Tranquillité publique. L'activisme politique et le prosélytisme religieux deviennent des critères de fichage.
2018 : Un décret conditionne l'attribution des aides sociales d'urgence, CMU et RMI à l'inscription au Fnaeg.