L’un de mes meilleurs souvenirs d’enfance se rattache à l’élevage des vers à soie. Je suppose qu’une maîtresse d’école fut à l’origine de cette occupation très instructive, mais c’est dans ma maison que je la développai. Mes parents m’avaient installée dans un coin du grenier , les vers à soie sur des canisses (claies) . Au village ,des personnes adultes s’adonnaient aussi à cette activité parce qu’elle rapportait un peu d’argent. Il fallait avoir de la graine pour démarrer l’élevage.
Différentes phases de la vie et de la transformation du ver à soie
Aux enfants (dont je faisais partie), la graine provenait de nos voisines qui , elles ,l’achetaient.Elles nous en donnaient quelques dizaines je pense .Après l’écolosion , il fallait nourrir les petits vers. Sur la route de Draguignan , à un km et demi d’Ampus, il y avait quelques mûriers dont les feuilles étaient indispensables aux vers à soie qui s’en nourrissaient. Nous allions ramasser les feuilles tous les jours car , sur des feuilles sales, les vers à soie risquaient d’attraper une maladie. Ces petites bêtes étaient très voraces ; elles grossissaient vite, on les appelait aussi magnans , terme provençal. Et les magnans mangeaient de plus en plus! Au bout d’un certain nombre de jours , une dizaine je pense,il fallait installer des branches sur le tapis de feuilles pour que la transformation en cocons puisse s’opérer.Cette opération s’appelait l’encabanage.
Le ver à soie allait devenir cocon, rien d’autre ne l’intéressait plus.
Pour la vente des cocons à un sériciculteur (qui se trouvait aux Arcs), il ne fallait surtout pas pas que les cocons soient troués , c’ést-à-dire que la chenille soit devenue papillon. Avant l’ultime transformation , il fallait ébouillanter les cocons pour que le papillon ne naisse pas et que le fil de soie ne soit pas coupé.Les femmes qui pratiquaient l’élevage du ver à soie étaient appelées magnanarelles. Une magnanerie (terme venant de l’occitan magnan qui désigne le bombyxdu mûrier) est le lieu d’exploitation des vers à soie ou industrie de la sériciculture.Au bout de la transformation le résultat était du fil de soie qui allait servir à confectionner des objets :foulards-chemisiers-dessous…en soie naturelle pour les coquettes fortunées.Voilà l’odyssée du ver à soie devenu vêtement de luxe à une époque où le nylon et autres fils synthéthiques n’existaient pas.
Ci-dessus phase interdite si l’on voulait du fil de soie, le cocon devait demeurer intact, sans coupure.Mais indispensable pour les oeufs. Donc certains cocons étaient conservés pour que la chrysalide devienne papillon.Très instructif pour un enfant, je vous assure.Je me souviens de toutes les opérations.
Ci-dessus une magnanerie et les employés. On voit bien les grappes de cocons accrochés aux branches.Le sud de la France (partout où pousse le mûrier : Cévennes-Vivarais-Drôme-Alpes de Haute Provence-Var…) était la région privilégiée de la culture des vers à soie.
Video dans la Drôme - L’atelier musée de la soie
Video: Les magnarelles
Mireille - Gounod - “Chantez, chantez magnarelles…”