Voilà pourtant des Jeux qui sentaient bon l'air pur et les grands espaces. La Colombie Britannique, ses matins brumeux, ses orques monochromes, ses cadres dynamiques arrivant au bureau leur vélo sur l'épaule. Un joli programme, vendu sur dossier clés en mains aux beaux messieurs du CIO, estampillé développement durable, éco-responsable, commercialement équitable, tout JO tout bio. Mais voilà, le climat s'en mêle (ou s'emmêle, ça revient au même). Pas un cristal de neige à l'horizon alors que le compte à rebours précédant l'ouverture des Jeux touche à sa fin. On imaginait déjà le comité d'organisation de Vancouver convoquer les derniers chamans indiens, ultimes survivants de la petite vérole et de l'eau de feu, pour entamer l'une de leurs danses ancestrales, censée faire dégringoler l'or blanc des nuages…
Ben non, patatras ! L'homme blanc, même canadien, préférera toujours le pétrole aux rites indiens. C'est à coup de camions que la neige qui fait défaut dans la capitale de la Colombie britannique est acheminée du reste du pays. Le beau manteau immaculé vire au gris et l'empreinte énergétique de ces Jeux au grand air prend s'élargit comme une patte de dinosaure. Mais qu'importe, le rêve olympique n'a pas de prix. Peut-être cette anecdote sportivo-climatique n'est-elle qu'un signe avant-coureur de la fin annoncée des Jeux d'hiver ? Après tout, si nous continuons à faire chauffer la Terre comme une cocotte-minute, l'avenir de cette sympathique sauterie entre pistes et patinoires risque fort de s'écrire en pointillés. "Mais tous les spécialistes ne sont pas d'accord", comme dirait Michel Charasse. Il est même des climatologues qui prévoient que le réchauffement climatique, en modifiant la route du Gulf Stream, pourrait par ricochet contribuer au refroidissement de nos côtes. La Gironde aurait alors à peu de choses près un climat semblable à celui du Québec. Et si Bordeaux était finalement la meilleure ville candidate pour espérer un jour voir la France organiser à nouveau les Jeux d'hiver ?