Toyota : l'arrogance m'a tuer !

Publié le 09 février 2010 par Muzard


La crise à laquelle Toyota est confrontée depuis plusieurs semaines est un rappel à l'ordre pour tous les grands groupes en particulier les leaders.

Dans le monde capitaliste, c'est clair, l'arrogance est un péché capital ! C’est toujours la même histoire. Un groupe accumule les succès, il détient les records de vente et de rentabilité. Il devient leader, fait figure de gourou du management et commence alors à donner des leçons à ses compétiteurs, challengers.

Et soudain, le géant vacille. Un seul vrai coupable? l’arrogance. Ce sentiment proportionnel à la taille des entreprises et qui rend les managers à la fois aveugles et sourds. Le géant se croit invulnérable. Ses clients le critiquent, illes juge ignorants « ils n’ont pas tout compris », ses concurrents dévoilent ses faiblesses « pure jalousie » répond-il, les salariés font remonter de mauvaises nouvelles, « manque d’esprit d’entreprise ». Le ver est dans le kaki*

General Motors en a fait l’expérience 2 ans plus tôt. Aujourd’hui, c’est son concurrent japonais qui découvre l’effet boomerang de l’arrogance du leader.

Ainsi on découvre que les tapis de sol de la Prius sont mal fixés et que la pédale d’accélération est défectueuse. Et conformément à l’adage, jamais deux sans trois, on vient d’apprendre un nouveau dysfonctionnement sur les freins de la Prius. C’est l’effet « appel d’air » : un « pépin » en appelle un autre. Un premier problème siffle la fin de l’omerta, les lèvres s’entrouvrent, dès lors, les failles du groupe apparaissent au grand jour.


C’est vrai que l’image du leader en prend un coup : entre la pédale d’accélérateur qui se bloque et le frein qui tarde à agir… la Toyota devrait pouvoir attirer les candidats au suicide sans difficulté, sauf que pour l’instant la cible reste étroite… alors, les marchés n’apprécient pas, l’action chute de plus de 20 %, les clients s’interrogent sur la sécurité de leur voiture et le patron prie pour sauver sa tête.

En quoi l’arrogance a - t- elle eu raison de la crédibilité de Toyota ?

D’abord, Toyota n’a pas su entendre les signaux précurseurs d’une crise : les actions en justice qui l’accusent depuis plusieurs mois de dissimuler des défauts,des enquêtes menées par des autorités de sécurité routière américaines, des réactions de clients… Le géant se veut parfait et ne peut pas reconnaître ses imperfections.

Ensuite, face au constat de dysfonctionnement, il tente un rappel de produits en toute discrétion espérant sauver son image de marque.Quelle naïveté, notre monde est de plus en plus transparent, tout finit par se savoir. Il aurait mieux valu alerter les médias, s’expliquer sur ce retrait avant même que ceux-ci ne découvrent le pot aux roses. Il lui aurait fallu reconnaitre que les médias étaient plus forts que lui.

Enfin, après plus de 2 semaines de polémique, le patron de Toyota a daigné s’exprimer en public sur le sujet. Mais il s’est contenté de s’excuser, mollement.La tradition japonaise veut que si l’on ne pratique pas le Hara Kiri, on s’incline longtemps et très bas pour exprimer ses regrets et susciter l’indulgence du public.Comme chez les chimpanzés qui se « font tout petits » pour susciter la compassion de la tribu et se faire pardonner.Akio Toyoda, s’est seulement incliné quelques secondes. Chez les chimpanzés, sa posture ferait figure de provocation, chez les hommes, c’est pareil. Ses discrètes excuses n’ont convaincu personne.

D’autant que les excuses ne représentent qu’un premier pas, en matière de crise, il faut aussi expliquer. Sans explication, pas de pardon, car le doute est toujours présent.

Mais là encore, pour un leader arrogant, s’excuser et surtout se justifier, représentent la pire des humiliations.

Communication partielle, trop tardive et maladroite, le géant a tout faux en matière de gestion de crise, visiblement, il ne s’attendait pas à être confrontée à une crise de cette dimension. Il ne disposait pas de process de prévention de crise. Arrogance, arrogance quand tu nous tiens !!

En tout cas, son concurrent américain, lui, a bien compris comment gérer une crise médiatique. Confronté à des problèmes de freinage, Ford, joue la transparence. Il explique la nature du problème et surtout souligne qu’il a pris la décision de rappeler quelques 20 000 véhicules conformément au principe de précaution. Un incident mineur aurait  suffi selon lui,  à justifier cette décision de rappel. En agissant ainsi, il s’offre à travers cette campagne de rappel produits, une belle campagne de publicité !

 * fruit japonais