Ce n'est pas une semaine à marquer d'une pierre ciné-philosophale blanche. Moins pire que la semaine prochaine, la litanie monotone des sorties sans réelle nécessité ne m'incite qu'à une chronique paresseuse et blasée. Je n'ai pas assez profité de ces mercredis de luxe où j'avais tant de mal à sélectionner entre les sept ou huit perles dont la pureté troublait ma vue.
Il neige and I got the red.
Je vous laisse comme d'habitude avec la musique de film de la semaine. Cette fois (cette fois encore), un coup de cœur. Dès les premières mesures, j'ai envie d'être aux côtés de Holly Golightly à la place de ce fadasse de Paul, de lui tenir la main et lui dire que le monde est bleu aussi, parfois. Si vous avez trouvé le titre du film, vous avez gagné. Si vous avez trouvé le titre, l'actrice principale, le réalisateur et l'auteur du bouquin d'origine, vous êtes très très fort(e)s, voire soit vous avez triché, soit vous êtes vraiment fan.
Au fait, un bout de ce papier a été mis en ligne par erreur et a été visible toute une nuit sans mon consentement. Mes excuses pour cette fausse manœuvre.
I lov e you Philip Morris
film américain (US) de Glenn Ficarra et John Requa (2008, 1h36)
Avec Jim Carrey, Ewan McGregor, Leslie Mann
Distributeur : EuropaCorp Distribution
Sélection Officielle - Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes 2009.
Synopsis : L'histoire vraie d'un ex-flic, ex-mari, ex-arnaqueur aux assurances, ex-prisonnier modèle et éternel amant du codétenu Philip Morris. Steven Russell est prêt à tout pour ne jamais être séparé de l'homme de sa vie. Ce qui implique notamment de ne pas moisir en prison. Jusqu'où peut-on aller par amour ? Très loin si l'on en croit l'histoire incroyable de Steven Russell, un génie de l'évasion rattrapé par son romantisme.
Ce premier film aurait pu n'être pas diffusé au motif du " caractère sexuel trop explicite de certaines scènes qui pourrait choquer le public familial". Il n'est d'ailleurs pas encore sorti aux États-Unis... A ce propos, il serait sans doute utile d'expliquer aux cisailleurs de la censure américaine qu'on n'est pas obligé d'emmener ses jeunes enfants ou ses vieux parents, voire ses cousins ultra ou ses cousines hétéro-vierges à 35 ans au cinéma, quel que soit le film. On pourrait peut-être leur dire aussi que l'homophobie nuit tout autant à l'entourage des homophobes que le tabac à l'entourage des fumeurs. Pour ne rien dire des fumeurs homophobes.
Selon le film est " Clément Graminiès de un pied de nez décomplexé à la mort et à l'absurdité d'une existence qui n'amènerait que des contraintes, laissant après la projection un indicible sentiment de mélancolie euphorique". Film " à la gloire du génial acteur américain" ( Libé). " Tout est possible pour le géant Jim Carrey" ( Les inrocks). Télérama en dit plus long : " L'acteur caoutchouteux, modelable, incarne idéalement cet homme sachant se réinventer en toutes circonstances. Il fait légèrement la grande folle, mais, au fond, ni plus ni moins que dans ses rôles d'hétéro déjanté." Gérard Lefort en rajoute dans Libé : " Il n'est pas certain que I Love You Phillip Morris ait eu vraiment besoin d'un réalisateur tant la forte impression qu'il nous fait tient au bagout verbal et à l'abattage physique de son principal protagoniste. I Love You est, du début à la fin, un film de, avec, et sur Jim Carrey. Comme une sorte de programme complet où l'acteur en manières plastiques assurerait à la fois le grand film, son making of et les bonus. Autant dire : le quitte ou double". On est donc prévenu : ce film, quelles que soient par ailleurs ses qualités, sera vu par le prisme de Jim Carrey, qu'on soit fan ou pas et si on ne l'est pas, prudence. Critikat,
J'avais trouvé la bande-annonce navrante, mais il est vrai que les concepteurs de BA aujourd'hui, qui ne s'autorisent pas une séquence d'une durée supérieure à la seconde, feraient facilement passer un Tarkovski pour une pub Nike. Les critiques modifient mon angle de vue. C'est d'ailleurs le rôle de la critique d'éclairer la ciné-âme égarée.
Le temps des grâces
film documentaire français de Dominique Marchais (2009, 2h03)
avec Matthieu Calame, Pierre Bergounioux, Lucien Bourgeois
distributeur : Capricci Films
Synopsis (par Télérama) : Une enquête belle et profonde sur le monde agricole français d'aujourd'hui. Le film questionne de l'intérieur la rationnalité qui a présidé aux grandes métamorphoses du travail de la productivité et du paysage. A travers des récits d'agriculteurs, d'agronomes, d'écrivains et d'autres témoins, à un rythme aussi serein que prenant, il évoque le rôle que pourrait tenir l'agriculture dans un nouvel art de vivre et un projet politique commun.
A partir d'un sujet proche du récent et profond Profils paysans de Raymond Depardon, Dominique Marchais s'interroge dans ce premier long métrage sur la façon dont l'humanité est passée de la paysannerie à l'agronomie, avec cet axiome : " L'agronomie a une puissance utopique".
Si je résume la presse, le film se montre constamment pédagogique et passionnant sur son sujet premier, " l'histoire d'un pays qui a peu à peu épuisé (au sens propre) sa terre à force de l'exploiter, de la surexploiter depuis la fin de la guerre" ( Les inrocks), mais vise une cible plus large que la paysannerie : " Rien de durable ne peut s'envisager, comprend-on à l'issue de ces deux heures d'exposé, sans une refonte globale du système économique et politique dans lequel nous vivons aujourd'hui" ( Le Monde).
Apparemment plus qu'un "film rural" ou écolo supplémentaire, une œuvre qui s'interroge et nous interroge sur notre devenir collectif.
film français d'animation de Jean Image (1950, )
Jeannot l'intrépideSynopsis : Le petit Jeannot et ses frères se perdent dans la forêt. Après un voyage semé d'embûches, ils sont capturés par un ogre qui les rapetisse. Les voilà en cage comme des insectes. Mais Jeannot parvient à s'échapper, et sauve la Reine des abeilles d'une invasion de frelons. C'est alors que la rûche entière vient attaquer le château de l'Ogre...
Je ne connais pas vraiment Jean Image, mais son nom sonne à ma mémoire comme un air de mon enfance, un parfum de violette et de sous-bois. Comme je n'ai pas grand chose à en dire, je laisse la parole aux spécialistes de la Cinémathèque française (qui n'ont, manifestement, pas énormément de choses à raconter non plus...) :
" En 1939, à l'époque où le dessin animé français connaît son essor, Jean Image réalise son premier film d'animation, Le Loup et l'Agneau, d'après la fable de Jean de La Fontaine. Métaphore du nazisme et de l'invasion de la Tchécoslovaquie par les Allemands, le film est détruit pendant l'Occupation. En 1949, son premier long métrage d'animation, Jeannot l'Intrépide, est le premier long métrage d'animation français. Influencé par le graphisme de l'américain Walt Disney, il se définit par un style classique et participe activement à la vitalité de l'école française d'animation, menée par son confrère Paul Grimault. Les techniques et les styles à travers le monde évoluent plus rapidement que son propre travail. Il laisse cependant des oeuvres telles que Aladin et la lampe merveilleuse (1969), Les Fabuleuses Aventures du légendaire Baron de Münchhausen (1977) ou Le Secret des Sélénites (1981)."
La presse ne dit presque rien de ce film. Les inrocks évoquent " une féerie ligne claire, aux images colorées et limpides, aux dialogues raréfiés, dont l'essentiel repose sur les associations d'idées graphiques, le foisonnement thématique et formel."
Pour un après-midi de neige.
(The Sandpiper)Le chevalier des sables
film américain (US) de Vincente Minnelli (1965, 1h57)
directeur de la photographie : Milton R. Krasner (compagnon de Wilder, Mann, Hawks, Ford et souvent Minelli)
distributeurs : Action cinémas et Le Théâtre du Temple
avec Elizabeth Taylor, Richard Burton, Eva Marie Saint, plus
Synopsis : Danny Reynolds vit seul avec sa mère. Après qu'il a tué un chevreuil, les autorités l'envoient dans un internat. Commence alors une idylle scandaleuse entre sa mère et le prêtre chargé de l'éducation de Danny...
L'affiche de ressortie est aussi moche que l'originale, mais ça ne veut rien dire. Certes, Le chevalier n'est pas, comme on dit, le meilleur film de Minelli, et ces dernières semaines, Les quatre cavaliers de l'Apocalypse ou Un américain à Paris étaient visibles (à Paris, évidemment), fallait y aller. Mais revoir Burton- Taylor, entre deux divorces ou deux re-mariages, dans la force de leur fatale beauté est un bonheur auquel les meilleurs Minelli n'autorisent pas l'accès.
Pour fêter la Saint-Valentin, le Grand Action présente un très beau festival titré L'amour fou. Peuplé de films ordinaires, de grands films et d'un petit nombre de films sublimes, ce cycle follement amoureux inspire le désir. Au moins le désir de cinéma.
Pour la sélection et les horaires, cliquer sur l'image.
Au cœur d'une programmation souvent sentimentalo-jouissive, au moins un film orgasmique. , film américain de FW Murnau (Sunrise: A Song of Two Humans) est un des 15 ou 20 films qui justifient l'invention du cinéma. Ce film de 1927 (muet, ben oui) est, selon le site intéressant dont le lien suit " l'oeuvre la plus symphonique, la plus synthétique, la plus cosmique et en définitive la plus lumineuse de Murnau", sentence qui copie, sans le citer, l'historien du cinéma Jacques Lourcelles, ce qui n'est pas bien. 1927 (1925-1928) marque l'apogée du cinéma muet que l'industrie allait mettre en cause dès 1929 ( Le chanteur de jazz, un film médiocre mais parlant et tous les studios allaient se lancer dans le cinéma bavard qui mettrait ensuite bien des années pour atteindre, à nouveau, le niveau d'exigence morale et esthétique du cinéma de la fin des années vingt, avant la logorrhée). François Truffaut tenait L'aurore, simplement pour "l e plus beau film du monde".
Le festival L'amour fou permet aussi de revoir Sérénade à trois ( Lubitsch), Les amants ( Malle) ou Le dernier tango à Paris de Bertolucci et bien d'autres...
Comment vous dire d'y courir ?
L'aurore, sur le site d' Excessif, CLIQUER ICI.
L'aurore sur le site Cinéma(s) Le France, CLIQUER ICI, pédago.
L'aurore sur le site passionnant du Ciné-club de Caen, CLIQUER ICI.
Vraiment, L'aurore est une absolue merveille