Gardes à vue : Annulations en série par le tribunal de grande instance de Paris

Publié le 07 février 2010 par Copeau @Contrepoints

Le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Paris a annulé le 28 janvier cinq gardes à vue selon les informations de Matthieu Aron et Anne Jocteur Monrozier sur France-Info. Une nouvelle critique contre les "gardes à vue à la française", dont le nombre très élevé avait déjà choqué récemment.

Les juges ont annulé les gardes à vue, estimant, en s'appuyant sur la récente législation européenne, que la garde à vue en France ne permettait pas un exercice correct des droits de la défense et donc un procès équitable.

Le tribunal a constaté que l'aide que l'avocat peut apporter à un client placé en garde à vue est insuffisante, au regard de la norme en Europe.

Principaux attendus du tribunal :

Cet entretien de trente minutes ne correspond manifestement pas aux exigences européennes. L'avocat ne peut remplir les différentes tâches qui sont le propres de son métier et dont quelques unes sont rappelées et énumérées par les arrêts récents de la Cour européenne.

Il lui est impossible de "discuter de l'affaire" dont il ne sait rien si ce n'est la date des faits et la nature de l'infraction retenue et ce que la personne gardée à vue (simplement informée de la "nature de l'infraction", article 63-1) peut en savoir elle-même.

Il lui est impossible "d'organiser la défense" dans la mesure où il ignore quels sont les "raisons plausibles" de soupçons retenus par l'officier de police judiciaire pour décider de la garde à vue.

La "recherche de preuves favorables à l'accusé" ne peut être qu'extrêmement aléatoire faute de savoir quelles sont les preuves défavorables et les circonstances de l'affaire.

Il en va de même de la préparation des interrogatoires auxquels il ne peut de toutes façons pas participer. Cette mission de spectateur impuissant est d'autant plus préjudiciable que la garde à vue constitue une atteinte majeure à la liberté individuelle, majorée par ses conditions matérielles et sa fréquence.

Il appartient au juge français dont la mission essentielle, énoncée par la Constitution, est d'être la gardienne de la liberté individuelle, de faire respecter les principes du procès équitable, notamment dans cette composante essentielle que sont les droits de la défense.

Il lui appartient également de faire prévaloir la Convention européenne, d'application directe en droit national

Une bonne nouvelle pour les droits de la défense et le respect de l'état de droit en France.

Image : Flickr, licence creative commons