Petites
astuces pour bouffer l'argent européen sans se fatiguer
Chers
frères africains, pour devenir riches, captez les fonds européens
autrement : créez des ONG.
Frères africains, au cours des cinquante dernières années,
nous avons suffisamment enrichi l’Europe. Par notre travail, par
nos ressources naturelles pillées, par nos argents publics détournés
et planqués dans des banques du Vieux Continent. Il est à présent
temps que nous songions à nous enrichir nous-mêmes.
Beaucoup
d’entre nous partagent cette ambition légitime, mais bien peu
nombreux sont ceux qui parviennent à sortir de la camisole de force
de la pauvreté que les Européens nous ont enfilée. Pourquoi ?
Entre autres, parce que nous pensons pouvoir utiliser le système de
prédation ultra-capitaliste qu’ils ont mis en place pour nous en
sortir à notre tour.
Par exemple, nombre de nos frères
montent de prodigieux projets d’entreprise ou de PME et font par la
suite la manche devant les guichets de banques pour obtenir un
crédit. Ce qu’ils oublient, c’est que ces banques,
essentiellement des succursales de banques européennes, ne sont pas
là pour financer l’économie des pays africains, mais presque
exclusivement, pour pomper les épargnes africaines et les orienter
vers le financement des PME-PMI européennes installées en Afrique,
tandis que les bénéfices mirobolants retirés de ces épargnes
placées ailleurs sont rapatriés en métropoles.
De même,
inutile de compter sur les gouvernements africains. La plupart
d’entre eux comptent aussi sur les soutiens financiers européens,
y compris pour payer leurs fonctionnaires. Que faire ? S’installer
dans l’informel ? Cela servirait juste à survivre, car les
travailleurs du secteur informel sont depuis longtemps plus nombreux
que ceux du secteur formel. La concurrence y est, de surcroît, plus
vive.
Créer une PME et faire les yeux doux à
l’administration pour obtenir des marchés publics de gré à gré
? Cela peut marcher pendant un certain temps. Mais tout l’édifice
échafaudé peut fondre du jour au lendemain comme beurre au soleil,
lorsque le ministre protecteur est « victime » d’un remaniement
ministériel, comme cela arrive fréquemment, ou quand survient un
changement brutal de pouvoir, ce qui n’est pas rare.
Un ami
à qui je faisais part de mon pessimisme quant à la possibilité de
s’enrichir dans un tel contexte m’a donné des conseils utiles
que je m’en vais vous répéter. Il faut, précisément, tirer
profit du contexte, m’a-t-il dit.
De quoi s’agit-il ? Les
Européens disent que nos États sont défaillants et qu’au lieu
d’y injecter des fonds par la suite irrécupérables, il vaut mieux
soutenir les acteurs non étatiques : associations, collectivités
locales, etc. Chers frères africains, cessez de perdre votre temps
devant des banques qui ne vous accorderont aucun argent susceptible
de faire prospérer vos affaires. Cessez de contourner le fisc en
faisant disparaître vos entreprises du secteur formel pour les faire
renaître dans l’informel. Pour devenir riches, captez les fonds
européens autrement : créez des ONG.
De nos jours, l’ONG
nourrit bien son homme – ou sa femme, égalité des sexes oblige.
Par exemple, au lieu de se casser la tête dans des montages
financiers pour des projets de développement agricole pour lutter
contre la faim, créez plutôt une ONG pour la sauvegarde des grands
chimpanzés d’Afrique centrale menacés d’extinction, à cause
des barbares de cette région qui les prennent pour du bon gibier.
Vous obtiendrez à coup sûr une sinon plusieurs subventions d’Europe
et d’autres parties du monde civilisé.
Il faut être
malins, mes frères. Guettez les signaux émis par les grands
intellos européens. Vous saurez ainsi, par exemple, que quand ils
parlent des droits de l’homme, ils ne pensent pas au droit à
l’alimentation, à la santé, au travail. Ces droits, pour eux,
sont secondaires. Leurs vrais droits de l’homme, ce sont les droits
politiques.
Par conséquent, chers frères, les ONG des
droits politiques rapportent plus que les ONG à vocation sociale ou
économique. Elles rendent aussi ceux qui les dirigent plus
importants que les autres. Alors, créez le maximum d’associations
de défense de la démocratie, de la liberté de presse, de la
liberté sexuelle. Ce sont alors les subventions européennes qui
viendront vous chercher.
Pour gagner toujours plus de
subventions, attaquez régulièrement vos gouvernements. Que vous
soyez inquiétés ou non, racontez partout que vous êtes privés de
tout. Vous serez la coqueluche des médias européens. On vous
déroulera le tapis rouge partout. Vous visiterez le monde entier. On
vous décernera des prix, vos poitrines croupiront sous le poids de
décorations.
Ne vous arrêtez pas tant que les programmes
européens de financement ne sont pas achevés. Pour gagner plus,
quelqu’un l’a dit, il faut travailler plus. Alors, au sein de vos
ONG, faites travailler vos méninges pour maintenir vos subventions.
Par exemple, secrétez plusieurs associations satellites à
qui vous reverserez une partie des fonds reçus, juste de quoi les
faire survivre et donner l’illusion d’un travail en réseau.
Votre lecture quotidienne doit être le site Internet de l’Union
européenne. Il fournit des renseignements précieux sur les
partenaires potentiels à intégrer pour avoir plus de chances d’être
subventionnés, ainsi que sur la façon de rédiger les formulaires
de demandes d’aides.
Dans vos projets, prenez bien soin
d’indiquer en premier partenaire une ONG européenne des droits de
l’homme, etc. Même dans le secteur de la « société civile »,
c’est celle du Nord qui domine et fixe les règles du jeu.
Vous
l’avez compris : vous perdriez temps, énergie et « amis »
européens en créant une ONG de défense de la souveraineté de vos
États. Aucun fonds européen n’est disponible à cet effet. Aucune
ONG européenne ne travaille dans un sens non européen. Et aucun
parti politique européen, y compris ceux ayant accolé l’épithète
socialiste, ne vous aidera sérieusement.
En réalité, en
captant les fonds européens, nous ne ferions que récupérer notre
argent indûment détourné par les banques et les multinationales
européennes. Voler un voleur, est-ce voler ?
Valentin
Mbougueng est président de la Ligue internationale des journalistes
pour l’Afrique. "
Mr ASSADEK aboubacrine
Assistant au département de
mathématiques et informatique
à la Faculté de Sciences et
Techniques de l'Université de Bamako.
site:
http://www.aboubacr
ine-assadek. com/
Kofi Annan : "Pas de développement
sans sécurité, pas de sécurité sans développement, ni
développement ni sécurité sans respect des Droits de l’Homme"
Connaîre et faire connaître le peuple touareg.