Philippe Rey
Traduit de l’anglais par Françoise Adelstain
Titre original : Labor Day
ISBN : 978-2-84876-155-8
Partant d’un cadre tout à fait banal, le sujet évolue progressivement, se transformant imperceptiblement en une histoire hors du commun.
Ainsi le cadre de départ, celui d’une famille mono-parentale composée d’un jeune garçon et de sa mère -la « jeune et jolie Adele » que l’on imagine bien être devenue mère trop tôt- va vite sortir de sa définition aseptisée : Adele est une femme particulière, qui redoute de sortir de chez elle, limitant au maximum ses incursions dans le monde extérieur. Henry, à l’instar d’un autre jeune garçon du même âge dans Le fond des forêts de David Mitchell, est arrivée à cette période charnière séparant la pré-adolescence de l’adolescence. Il se sent à l’étroit dans l’espace restreint que constitue la vie avec sa mère, sentant confusément que la vie ne peut pas être uniquement cela, et pourtant, il redoute les samedis en compagnie de son père et de « la famille recomposée » : sa belle-mère Marjorie, le fils de cette dernière issu d’un précédent mariage, et la nouvelle petite sœur, Chloe.
Une rencontre fortuite au supermarché va venir tout bouleverser. Franck, prisonnier évadé, réussi à convaincre Adele et Henry de l’aider, juste quelques jours, et contre toute attente, cette femme en apparence si méfiante accepte. Toute l’histoire est racontée du point de vue du jeune garçon, et, en quelques mots, on comprend que l’histoire ne fait que commencer, qu’elle ne se passera absolument pas comme prévue, et nous voilà avec eux, à bord de la voiture, suivant ces trois destinées.
J’ai compris, brusquement, que les choses allaient changer. Nous voguions dans l’Espace, maintenant, dans le noir, le sol allait peut-être disparaître et nous ne serions plus capables de dire où cette nacelle nous emmenait. Peut-être qu’on reviendrait. Peut-être pas.
Si ma mère a eu le même pressentiment, elle n’en a rien laissé paraître. Accrochée au volant, le regard fixé droit devant elle comme d’habitude, elle nous a ramené à la maison.
Peu à peu, les masques tombent, et la vérité apparaît, terrible et menaçante, si différente de ce que les apparences laissaient présager, et jusqu’à la dernière page, on reste en haleine, fasciné et inquiet par la tournure que prennent les évènements. Rien n’est jamais joué, semblent dire tour à tour les personnages, et l’écriture de Joyce Maynard porte magnifiquement ce roman surprenant au sein duquel l’amour -ou son absence- occupe une place majeure.