Après la vie sexuelle des quadras (40 ans, toujours puceau), puis à la pré-paternité (En cloque), la bande à Judd Apatow (soit Seth Rogen et Evan Goldberg) poursuit sa délicieuse régression au pays des hormones. Réalisé par le trop rare Greg Mottola, SuperGrave s'intéresse de près à trois ados un peu obsédés, mais surtout troublés et inquiets à l'idée de passer, disons, à la vitesse supérieure. Ils cachent cette peur panique derrière une coolitude forcée, une grossièreté de tous les instants ou un romantisme forcené ; en tout cas, leurs comportements radicalement différents les embarquent tous les trois dans des aventures plus ou moins improbables, mais d'une considérable drôlerie.
C'est d'abord par ses dialogues que SuperGrave fait mouche, le film utilisant un langage bien graveleux mais également très imaginatif, c'est-à-dire légèrement plus futé que dans un sketch de Jean-Marie Bigard (que je cite un peu trop en ce moment, alors qu'il y a quand même bien pire que son humour de fin de banquet). Le début du film est tout bonnement ) à pisser de rire. Quant aux situations proposées, elles sont souvent cocasses, mais on sent aussi qu'elles ont été bâties de façon à garder ce côté légèrement déprimant, à la façon des Ferris Bueller et autres teen movies d'antan (et de qualité). C'est notamment le cas de la conclusion du film, plus touchante qu'hilarante, qui baigne dans une pudeur délicate et un climat de spleen encore plus réussi que dans les deux films d'Apatow. Parfaitement en phase avec les mentalités de nos jeunes (et de nous, pas tout à fait vieux mais plus vraiment ados quand même), le film est à la fois un divertissement imparable et un document sociologique que l'on devrait conseiller à tous les parents du monde. Dans la peau de nos trois ados, le trio d'acteurs vaut le détour, et nul doute que s'ils ne s'obstinent pas à jouer dans de pâles copies de ce SuperGrave, on risque de parler d'eux fort longtemps.