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Comme je l’avais fait pour Elvis Perkins et The Dodoz, je me fends d’une double chronique pour rattraper notre retard sur une énième formation Brooklynienne. Plus important encore, cet exercice a le mérite de constater l’évolution, de pratiquer la comparaison, voir même de souligner l’amnésie collective dont semblent faire preuve mes collègues. Yeasayer serait le buzz de 2010, soit. Mais on oublie trop vite qu’il l’a déjà été en 2007, et selon moi pour de bien meilleures raisons. Plantons rapidement le décor, Yeasayer ce sont quatre personnalités apparemment adorables, d’une grande simplicité parait-il, qui pratiquent comme on l’a dit un rock expérimental imprévisible et sans frontières. Tous comme les inévitables Animal Collective ou TV On The Radio, Anand Wilder, Chris Keating, Ira Wolftuton et Luke Fasano construisent un univers sonore très riche, entre pulsations électroniques et envolées électriques. Un nombre de couches improbable, des harmonies vocales sur le fil du rasoir, des nappes de claviers synthétiques, c’est un peu tout cela que l’on retrouve chez Yeasayer, l’effet world music à la sauce pop en plus. Brian Eno et autres Talking Heads avaient été les premières influences revendiquées, à présent l’on parle de Depeche Mode ou Of Montreal, ok, mais qu’en est-il réellement de ces deux albums ?
Pour le premier, les nouveaux New-Yorkais avaient fait très fort, avec le recul. Sous une pochette énigmatique, ils livraient un disque court (11 petits titres), plein de nuances, et surtout porteur de cet effet "feu de camp", pysché folk comme on dit. La première face, déroutante au possible, était la plus intéressante. "Sunrise" ou l’introduction parfaite à un univers qui pointe vers l’Afrique, "Wait for the summer" ou le gospel tribal moderne, puis l’un des irrésistibles single de l’année, "2080". Avec un petit effet "Roscoe" de Midlake (dont on attend impatiemment la chronique du dernier album par Fabien), Yeasayer assoit définitivement son style new age. L’interlude Fleet Foxesien "Ah, weir" et "No need to worry" (Merci Freddy Mercury) continuent de marquer l’identité d’un groupe vraiment varié. Même Black Sabbath est rappelé sur le surproduit (ou pas ?) "Wait for the wintertime". Malheureusement les derniers titres sont plus faibles, et donnent une impression désagréable de redescente en bad trip. C’est dommage.
Cette année c’est Odd Blood qui débarque, et nombreux sont ceux à en avoir déjà fait leur disque de l’année. La pochette s’est encore plus enlaidie, et le format (10 titres) ne s’est pas rallongé. Le groupe reprend là où il s’était arrêté, dans la même apesanteur futuriste et sucrée, et parait-il à la recherche de plus de cohérence. L’orchestration est une nouvelle fois très ambitieuse, certes, mais je ne retrouve pas le côté épique ou dansant que certains encensent. Je trouve même ce Odd Blood très lent. "The children" en ouverture par exemple n’est pas ce qui se fait de plus fédérateur, et je ne parle pas de "Love me girl" qui sous ses apparences proprettes ne fait penser qu’à du sous-Prince. Continuons dans le pire, "I remember", sympathique mais sans plus et "Strange reunions", vraiment très fatigant à force. Sans parler de "Mondegreen" qui remet le kitsch de George Mickaël au goût du jour. Alors heureusement, il reste "Madder red" gorgé de guitares et de houhouhou, "Rome" et son groove disco funk, ou encore "One", morceau le plus dansant de l’album. Même "Ambling Alp", équivalent singlesque de "2080" ne remplit pour moi qu’à moitié son contrat. Alors quand j’entends que ce deuxième album est fait de chansons d’été, et que le premier était sombre et lourd à digérer, je ne peux que penser exactement le contraire.
En bref : Yeasayer est un nouveau groupe de néo psyché folk très sympathique et talentueux sur lequel il faudra compter, mais personnellement le virage disco kitsch opéré sur Odd Blood m’a bien moins inspiré que la spontanéité de All Hour Cymbals.
Le site officiel et le Myspace (avec Odd Blood en streaming) et All Hour Cymbals en streaming
"2080" du 1er album en live, et "One" issu du 2ème :