(Dans le cadre du projet de vases communicants: Le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre, à charge à chacun de préparer les mariages, les échanges, les invitations. Circulation horizontale pour produire des liens autrement…)
Vous pouvez surfer en vitesse sur la surface plane, sans aspérités, elle est pigmentée, pixelisée, ça glisse facile, c’est une image pour l’imagination, un passage pour la passion (comme celui d’un grand boulevard parisien), un tremplin pour l’incertain.
Vous vous laissez emporter à toute blinde par ce qui se trame derrière la vitrine – elle n’est pas en gélatine – avec ses reflets qui vous montrent à l’intérieur déjà, sans qu’elle vous ait demandé votre avis.
La navigation terrestre est un art, pas besoin de permis bateau. Il suffit d’accrocher ses yeux au détail vu à l’horizon (une voile, des cheminées…), les vagues emportent le regard, le soulèvent comme une plume de mouette qui suit un ferry en s’amusant, et vous décollez dans les vents porteurs.
Au bout du chemin, une autre plage et là il faut stopper, les phares ne sont pas uniquement maritimes (l’automobiliste nocturne en est le gardien), la nuit s’est faite toute seule, elle enveloppe la présence, le monde des esprits est là, on frissonne, la chouette hulule sans discontinuer, comme par provocation.
Quel est ce sabbat où s’ébattent des abbés déshabillés ? Vous voyez ces lumières abbatiales, vous entendez ces rires démoniaques, ne faudrait-il pas prévenir la gendarmerie ? Le vent agite les branches, des nuages sombres défilent au-dessus du toit liturgique, la lune brille par son absence.
Vous repensez forcément à une phrase de Roland Barthes (La Chambre claire) : « La mélancolie même de la Photographie ».
Partout se multiplient les cérémonies secrètes.
Texte : Dominique Hasselmann
Photo : Dominique Autrou
(photo: cliquez pour agrandir !)