Après le flop monumental de l'excellent Catfights & spotlights (ce que les Sugababes avaient fait de mieux niveau paroles et surtout niveau vocal, mais qui pêchait par son manque de "tubes"), les Babes avaient promis qu'on ne les y reprendrait plus: elles reviendraient plus fortes avec une palette de tubes sous les bras. Aussi avait-on engagé "les producteurs de Beyoncé, Rihanna & Lady Gaga" pour aider les filles dans leur quête de nouveau succès, Stargate & RedOne en tête. Mais voilà, le destin avait décidé de s'acharner: on vire Keisha, la dernière membre originelle, et on esquisse de grands sourires maladroits en présentant Jade, la nouvelle Sugababe.
Ce qu'on peut déduire, après écoute de cet album, c'est que, de toute façon, les filles avaient perdu quelque chose, cette "originalité", qu'elles recherchaient depuis quelques albums d'ailleurs - Change avait été sauvé par ses quelques tubes super efficaces (About you now, Denial, Never gonna dance again), tandis que C&S se rattrapait avec la puissance & la musicalité de ses titres tout sauf mainstream (Sunday rain, Side chick, Can we call a truce). Alors soyons nets, soyons clairs: Sweet 7 est le moins bon album des Sugababes. Ce qui n'en fait pas forcèment une bouse, ceci dit. Mais on est loin de la réussite complète et de la résurrection que les filles éspéraient sûrement.
Virons de suite une idée préconçue: Keisha ou pas, ça n'aurait pas changé grand chose. On ne blâmera pas la faiblesse de l'album sur les épaules de Jade, puisque la pauvre n'est pas responsable des choix artistiques établis par ses bandmates avant son arrivée. La seule différence est au niveau vocal, et ce n'est pas là que l'album pêche le plus.
Car là où il pêche le plus, c'est à la production. Un mot suffira: c'est cheap. Loin des standards pop établis par Dr. Luke ou Xenomania sur Push the button, Red dress, Hole in the head ou Freak like me. Alors oui, RedOne a produit About a girl, et Stargate a officié sur No more you, mais les deux par exemple sont de sombres calques des précédents tubes des deux producteurs. Pas de surprise ici: on a pas donné aux Sugababes les "tubes", juste des sortes de morceaux pop-électro clés en main, assemblés à partir de bouts de ce qui marche en ce moment, et c'est là notre véritable déception. Crash & burn, par exemple, le titre enregistré après l'arrivée de Jade, sonne comme un Ryan Tedder en moins bien. Ca reste sympa, et on voterait bien pour le titre en tant que single, mais pas d'effusion fantastique, pas de claque dans la gueule, pas de sons qui vous laissent sur le cul (on veut un Ace reject bis, merde!). Jamais les Sugababes n'ont été aussi conformes, et aussi chiantes, en fait. Il n'y a plus grand chose d'excitant dans ce qu'elles proposent. Elles parviennent ceci dit à fagoter deux-trois pseudo tubes qui pourraient les sauver. On retiendra About a girl, quand même, juste parce qu'Amelle nous a quand même montré un bout de sein dans le clip, et puisque parce que même quand il est fainéant, RedOne parvient encore à rester efficace. On aime vraiment bien No more you, basique et déjà-entendu, mais qui passe très bien dans le genre "ballade façon Rihanna / Beyoncé", sans toutefois être vraiment wow. Sweet & amazing passe, si l'on imagine que c'est un single caritatif - on rendra d'ailleurs hommage à Chatquirat, notre fidèle lectrice, en reprenant sa formule: "Sweet & Amazing", à défaut d'être 'Amazing', est bien 'Sweet'" - c'est tout à fait ça. Il suffit aussi d'être un peu saoûl pou apprécier l'efficacité cheap d'un Wear my kiss / Goodbye, et Get sexy, même si la version Jade est inférieure, reste pas mal. Thank you for the heartbreak aussi, avec son côté retro et entêtant, et parce qu'on aime bien entendre la voix d'Heidi dans le refrain.
Une question d'ailleurs: où est passée Heidi? Déjà presque au second plan dans Catfights & spotlights, on la sent cette fois-ci vraiment en retrait, peut-être parce que sa voix ne sied pas vraiment à la nouvelle direction musicale choisie par les filles, effectivement. Ils ont quand même réussi à lui coltiner deux-trois middle 8, encore une fois.
Pour continuer, on met notre hola à She's a mess, qu'on aurait pu nommer "Autotune at its best", et qui nous rappelle le putissime Patron tequila dans ses effusions sexy, mais on garde le "bottle after bottle after bottle after bottle" quand même. Give it to me now a l'air d'être un de ces titres que Rihanna a rejetté de Music of the sun (bah oui, ça date). Miss everything a le malheur de garder Sean Kingston omniprésent et de sampler / voler Right round dans l'instru - BON. On aime beaucoup Little miss perfect par contre, parce que c'est un peu un retour au son Sugababes d'avant, et parce qu'Heidi cartonne sur les slows. Ca reste cependant un peu attendu (et un peu similaire à Unfaithful, non?).
On finira avec notre titre favori de l'album, Wait for you, qui aurait pu être énorme, mais qui a du être enregistré, mixé & produit par le gérant du fast food du coin, tant ça ne semble pas fini, pas parfait, trop light. Le refrain était presque tubesque, mais il lui manque une once de "BAM!", si vous voyez ce qu'on veut dire (et la version Keisha, pour le coup, lui était supérieure, moins forcée).
Pour vous faire plaisir, un petit bilan fille par fille: Jade sait chanter, je pense qu'on l'a compris, mais c'est là aussi qu'elle se loupe parfois. Ca sent un peu le "REGARDEZ, je sais chanter plus fort, je sais faire des ad-libs surpuissants!!!" qui tranche avec le sentiment général de l'album. Sans être forcé, ça sonne tout de même ... en décalage, c'est ça l'idée. Amelle a perdu quelque chose, elle aussi, en dehors de la beauté qu'elle a largué en même temps que sa coupe de cheveux et ses hanches. On ne sait pas vraiment pourquoi, mais son timbre de voix semble moins fin et intéressant que dans les précédents albums. Ou alors c'est juste qu'elle nous gave au possible. La pauvre Heidi nous fait bien pitié - on sent bien qu'elle n'est pas à sa place, et on aimerait tellement entendre plus de sa part (elle a toujours été notre petite chouchoute), surtout avec la voix originale et reconnaissable qu'elle a, mais elle n'a pas l'air d'avoir de plomb dans la cervelle, et on a malheureusement souvent le sentiment qu'elle fait la suiveuse, tout en fermant sa gueule. Dommage, Sometimes avait prouvé sur Three qu'il y avait quelque chose à en tirer.
Pour conclure, vous l'aurez compris, on est déçus. Et peut-être un peu méchants, mais c'est justement parce qu'on est déçus. Avec Sweet 7, les Sugababes livrent un album pop de consommation rapide, sympa, vite-fait, et qui peut plaire en gros, mais qui semble manquer de tant de choses une fois que l'on y regarde de plus près, de tous ces petits détails qui font le succès des grandes choses. On aimerait vous dire qu'on éspère que les filles sauront rectifier le tir et "se trouver" avec le prochain essai, mais on en est arrivé au point où l'on doute de la possibilité d'un prochain essai. Et si ça part vraiment en couille comme on le sent, on veut juste qu'Heidi nous la joue Diana Vickers et travaille avec Cathy Dennis.
Au final, si on était prof, sur la copie de Sweet 7, on écrirait au stylo rouge:
Sugababes: 4.0/10 - Passable. Gâche ses capacités par fainéantise ou volonté de trop bien faire (au choix). Attention au par coeur. Il est impératif de revoir les bases. (qu'on soulignerait deux fois)