Magazine Société

Pour maigrir : Sarkozypan 500, une fois par an

Publié le 03 février 2010 par H16

L’oisiveté est mère de tous les vices. Et quand on est Président, il arrive parfois qu’on n’ait rien d’autre à faire que se curer le nez, faire des crêpes (au sucre), ou proposer un truc-machin pour lutter contre les bidules-chouettes. Cette fois-ci, le truc-machin, c’est une « grande cause nationale », et le bidule-chouette, c’est l’obésité.

Et c’est par l’Express que nous apprenons donc que Sarkozy va lancer une opération d’effervescence nationale sur le thème : Comment manger moins joli, moins gras, moins piquant, moins salé, moins sucré, moins rigolo ?

Il est vrai que le bourrelet, le président, ça le connait : il le combat, régulièrement, en vrai et en photoshop, avec plus ou moins de succès. On comprend dès lors qu’il s’investisse pour que le reste des Français partage son âpre combat à trouver un corps sculpté digne des hautes fonctions qu’il occupe.

De petits problèmes de poids

Et voilà donc le pays qui, non content de se cogner les pénibles polémiques politiciennes de campagne électorale, non content de devoir s’introspecter le nombril pour y découvrir une identité parfois nationale, doit maintenant se lancer dans l’analyse alimentaire histoire de combattre le gras superflu.

L’article de l’Express attaque directement dans le vif du (corpulent) sujet : « Les dirigeants politiques semblent enfin prendre la mesure de la progression de l’obésité en France. » Ils sont un peu lent à la détente, ces bedonnants énarques et rondouillards politiciens, mais finalement, l’information a réussi à parvenir aux couches supérieures de leur bulbe cervical : des obèses se seraient glissés au sein de la population française.

Car à lire l’article, on a l’impression d’une menace fantôme dans laquelle des ninjas-obèses (mais très discrets, donc fort souples) se sont introduits dans toutes les couches de la population, prêts à frapper comme jadis les proverbiaux communistes de la 5ème colonne.

Et bien que le rapport n’ait pas été rendu public, vite vite, on se précipite de fournir 19 passionnantes propositions pour lutter contre ce fléau qui va, à n’en pas douter, frapper impitoyablement les Français dans les mois ou les années à venir.

19 propositions, ça en fait, mine de rien, un paquet. Pour la forme, je vais en commenter quelques-unes. Où l’on va découvrir que finalement, en France, rien ne change vraiment et c’est bien ce qui rend à la fois ce pays si spécial, si extraordinaire (dans son sens premier, loin de l’ordinaire) et si délicieusement foutu…

Ainsi, on trouve dans cette liste quatre grands types de propositions, tout à fait dans l’esprit habituel de l’action publique dès qu’il s’agit de se mêler de la vie des autres: l’état sait mieux que vous ce qui est bon pour vous car vous êtes une moule de canapé méprisable qui bouffez des chips gras en laissant des miettes dans le tapis et sous les coussins. L’Etat vous prendra donc votre argent parce que se vautrer comme ça, ça devrait être interdit, merde.

Pour en revenir aux quatre grands types de propositions, nous avons le célébrissime « Claquons l’argent des autres« , suivi de près par « Interdisons des trucs« , grand frère du « Obligeons d’autres trucs« , et enfin, « Faisons du vent pour avoir l’air d’exister« .

Claquons l’argent des autres

Catégorie sociologiquement proche du Vent Pour Épater la Galerie, on retrouve des propositions qui oscillent généralement entre le jetage d’argent par les fenêtres et l’esbroufe citoyenne.
Citons par exemple la proposition qui vise à mettre des paniers de basket ou des buts dans toutes les cours de récré. On notera que la densité d’infrastructures sportives importante dans les quartiers aux populations les plus modestes n’empêche en rien cette même population d’être la plus touchée par l’obésité. Eh oui : la vue d’un panier de basket ne déclenche pas toujours l’irrésistible envie d’y mettre un ballon.
Plus proche de la simple dépense financière qui soulage un peu la conscience et pas mal le portefeuille sans réellement amener de solution, on trouvera les propositions de distribution de coupons pour fruits & légumes frais, ou l’approvisionnement des structures caritatives en aliments bons pour la santé. Sans parler du fait qu’ainsi tournée, cette dernière proposition revient à supposer que les Restaus du Coeur filent des trucs louches voire dangereux à ses protégés, ce qui n’est pas très politiquement correct. Quant aux coupons, ils sont adaptés comme une bicyclette à un poisson : pour rendre les fruits et les légumes réellement abordable, le plus simple est tout de même de baisser les p-tains de taxes diverses qui touchent les producteurs, importateurs, vendeurs et consommateurs sur toute la chaîne, non ?
Miraculeusement, une proposition surnage dans ce niagara de dépenses ridicules : améliorer la prise en charge de l’obésité dans le système de soins, aussi bien pour les enfants que pour les adultes. C’est suffisamment vague pour offrir une vague planche de salut dans cette tempête de caramel bien pensant.

Interdisons des trucs


Là, c’est le côté Etat-Papa qui parle, avec son gros gourdin (pas celui qu’il enduit de vaseline pour la sodomie fiscale, l’autre, celui qui lui sert à cogner). Il s’agit donc ici d’interdire toute publicité de produits alimentaires à l’école car les enfants sont des êtres faibles, chétifs et impressionnables qui, lorsqu’on leur propose de la purée Mousline, se jettent dessus de toute leur force dans des petits couinement de gorets excités.
Accessoirement, un simple règlement intérieur et deux sous de bon sens suffisent ici à comprendre que c’est relativement inutile : les enfants ont rarement de l’argent de poche avec eux (racket oblige) et sont généralement très tentés par les « bidouilles » plus ou moins violentes sur les machines automatiques, ce qui fait qu’en moyenne, les sociétés rechignent à les installer… Mais bon, interdisons toujours un truc qui n’est pas installé, ça ne mange pas de pain.
Plus rigolo, l’interdiction des publicités pour la bouffe aux heures d’écoute des gamins : c’est sûr que ça va marcher ! Dès qu’on aura supprimé la pub, paf, les gamins n’iront plus fouiller dans les étagères et les frigos pour s’enfiler qui des pépitos, qui un cassoulet Faucart et Huet William Saurin. Ils regarderont les dessins animés en … tricotant, mettons.
Comme quoi, finalement, la psychologie tient à peu de chose. Et les horaires fixes pour les repas, les habitudes alimentaires montrées par les parents, tout ça, c’est du flan. Dans les familles modernes, lorsqu’un spot sur du chocolat passe, les lardons se précipitent sur la maîtresse de maison en criant « BriIing Moar ChocolaAate ! » et lui arrachent des bouts tant que la gâterie n’est pas fournie.

Obligeons d’autres trucs


Pendant qu’on interdit des bidules, on va en imposer d’autres. C’est ça, la balance de la loi, pour l’état :  il suffit simplement de charger la barque des deux côtés ! Par exemple en imposant l’équilibre des repas dans les cantines scolaires. Sans ça, ces cons de cuistots vont faire pâtes au jambon sur pâtes au jambon. Non stop.
Mais bon, soit, obligeons à faire du diététique dans les cantoches. Ca en occupera plus d’un et tout ça, à périmètre financier constant, ça promet des petits jeux de jambes amusants en ces temps de budgets grassouillets.
Plus rigolo, le projet de rendre obligatoire les fontaines à eau, partout, de tous les côtés. Pourtant, le principe de précaution est formel : comme il y a régulièrement des douzaines de personnes qui meurent d’avoir eu trop d’eau (notamment dans les poumons), on devrait y réfléchir à deux fois.
A part ça, pour lutter contre l’obésité, on ne voit pas trop le rapport. Voudrait-on noyer les obèses avec des petits gobelets pleins d’eau ?

Faisons du vent pour avoir l’air d’exister


Ici, on s’est dit qu’après les catégories précédentes, déjà discutables, il fallait à présent occuper le terrain. C’est le bouquet final, en quelque sorte.
Spots agressivement niais et messages de prévention sur le mode « La Raclette Après Une Bonne Choucroute, C’est Pas Automatique ! », cours de cuisine à l’école (avec la poterie et le macramé, c’est la totale : les petits lardons reviendront avec des colliers de nouilles et des biscuits douteux qu’il faudra ingurgiter – oui oui, les deux – en disant « Mmmh, c’est délicieux ! ») , petits logos acidulés et bondissants sur les Zaliments Santés qui donnent instantanément envie de filer des tartes (pas trop sucrées ni trop salées mais bien poivrées) à ceux qui les ont conçus, et bien sûr, last but not least et dans la parfaite rectitude sarkostique de l’action politique à frétillement ventral, inscrire l’actuel Plan national nutrition santé (PNNS) comme priorité de santé publique, lancez la Marseillaise et envoyez le Charles de Gaule !

Tout ceci n’est pas vraiment novateur, dans le fond.

Encore une fois, on se débrouille pour répondre à un problème par des rustines sans intérêt et des mesurettes à la limite du drolatique dans l’aspect dérisoire et décalé d’avec le problème.

Enfin, on pourra trouver révélateur que l’état s’occupe de l’obésité de ses citoyens alors qu’il a, lui-même, un énorme problème de poids, qu’il devrait être mis à la diète de toute urgence et semble pourtant parti pour continuer au même rythme ses gargantuesques orgies.

Un ogre obèse, pervers et goinfre est-il le plus à même de donner des conseils en nutrition ?


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


H16 229672 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine