On savait que Jean-Claude Marin n'est pas un magistrat indépendant.
On savait que le gouvernement voulait licencier plus facilement ses fonctionnaires.
On savait que le débat sur l'identité nationale était vicié.
Le vrai coût de l'avion de Sarkozy
La semaine dernière, la révélation, non confirmée, que Nicolas Sarkozy souhaitait le faire équiper d'un "four à pizza" a amusé et énervé les internautes. Ce n'est pas tout. L'important est ailleurs.
1. L’achat et l’aménagement de l’Airbus A330, ainsi que l’acquisition d’un second Falcon 7XL pour les besoins de la flotte présidentielle, ont été budgétés à 185 millions d'euros. Les seuls aménagements intérieurs sont évalués à 28,5 millions d'euros. Outre le récent "four à pizza", l'avion sera doté d'une baignoire... Un dispositif rarissime et très coûteux, habituellement réservé à quelques émirs.
2. A cause de cet avion, l'aéroport de Villacoublay, en banlieue parisienne, a dû aussi faire l'objet de travaux. La piste a été mise hors service pour plus de 6 mois. Elle ne pouvait supporter le futur Airbus du président. Surtout, il se murmure que le président français ne supportait plus devoir descendre sur le tarmac. Il lui faut un couloir protégé. Les aménagements sont conséquents, comme le rapportait Le Point en octobre dernier : "réfection complète de la piste et allongement de 1.850 à 2.000 mètres, réfection et élargissement des pistes de roulage (taxiways), mise aux normes de la loi sur l'eau (bassins de rétention), nouvel éclairage, etc."
Jean-Claude Marin, magistrat dépendant
Il a mal pris, paraît-il, les accusations de soumissions à l'exécutif présidentiel, suite à «sa» décision de faire appel de la relaxe de Dominique de Villepin dans l'affaire Clearstream: «Tout ceci me blesse, touche ma famille, a-t-il confié au Monde. Tous ces gens-là ne me connaissent pas, ne savent pas les combats que j'ai menés pour cette justice financière.» Au journaliste du Monde, le procureur blessé y est allé en confidences, rappelant ses joutes avec Nicolas Sarkozy («J'ai eu deux épisodes violents avec lui, alors qu'il était ministre de l'intérieur.»), son indépendance politique, ses faits d'armes divers et variés. Il confie ses convictions sur l'affaire Clearstream, défend son intégrité («Ce n'est pas un acharnement sarkozyste, je n'ai aucune agressivité dans l'exercice de mon métier. Je ne souhaite pas transformer un match Sarkozy contre Villepin en un duel Marin contre Villepin. Cette affaire est un piège, j'essaie de tracer mon sillon.»). Sait-il que sa personne n'est pas en cause ? L'affaire Clearstream est d'évidence une affaire politique, avant d'être pénale. N'en déplaise à la chanteuse de l'Elysée.
Lundi 1er février, interrogé sur Europe 1, Robert Badinter a expliqué qu'il trouvait normal et logique la décision d'appel. Il a surtout rappelé que les procureurs, comme M. Marin, ne sont pas indépendants. En juillet 2008, la Cour Européenne des Droits de l'Homme a considéré que les procureurs n'étaient pas des autorités judiciaires, car ils ne sont pas indépendants du pouvoir exécutif. C'est tout.
Virer les fonctionnaires
Le gouvernement a préparé un décret qui fait débat. Il a été présenté aux syndicats lundi 1er février. Il prévoit qu’un fonctionnaire dont le poste est supprimé puisse être licencié après 3 refus de postes alternatifs. Plus précisément, le décret met en place une période de « réorientation professionnelle », pendant laquelle il est « tenu de suivre l’ensemble des actions d’accompagnement prévues par son projet personnalisé et de répondre présent aux convocations de l’administration pour le suivi de la mise en œuvre de son projet. ».
« Le fonctionnaire dont l’emploi a vocation à être supprimé dans le cadre d’un projet de réorganisation ou d’évolution de l’activité du service dans lequel il est affecté peut être placé en réorientation professionnelle en l’absence de possibilité de réaffectation sur un emploi correspondant à son grade au cours de la période couverte par ce projet. »Cette période de réorientation est d’une durée indéterminée. Elle se termine dans deux cas de figure : en cas de nouveau poste, ou «à l’initiative de l’administration, après avis de la commission administrative paritaire, après que le fonctionnaire ait refusé successivement trois offres d’emplois dans les conditions prévues à l’article 44 quater de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. » Le fonctionnaire est alors mis en disponibilité, sans salaire ni traitement ni emploi. Le décret prévoit ensuite la possibilité de le licencier ou de le mettre en retraite d’office: « Le fonctionnaire qui refuse successivement trois postes qui lui sont proposés en vue de sa réintégration peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire ou s’il a droit à pension, admis à la retraite. »
Aucune autre motivation à ce licenciement n’est définie. Aucune condition n’est imposée aux postes proposés, tels l’éloignement géographique ou le statut. Cette mesure est « profondément normale» explique Eric Woerth.
Les doutes d'Eric Besson
Le ministre de l'Identité Nationale ne doute jamais. C'est même sa marque de fabrique de nouveau converti sarkozyste. Quand il a confié quelques doutes sur l'intérêt du débat, ce fut la (fausse) surprise. Un récent sondage enterrait les proclamations victorieuses d'Eric Besson sur l'engouement supposé des Français pour ce débat identitaire : un petit 22% des sondés trouvaient le débat constructif. En politique (sondagière), on appelle cela une claque. Surtout après 6 émissions télévisées consacrées, volontairement ou non, sur le sujet depuis novembre: «objectivement, ce n’est pas faux... Ils ont raison.» a commenté le ministre, lundi sur France info. Besson a dégainé une autre parade : un projet de décret interdisant la nationalité française en cas de burqa. Il faut bien s'accrocher aux branches électoralistes qui lui restent.
"Pour répondre à certaines rumeurs, Eric BESSON, Ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire, confirme avoir contresigné et transmis aujourd’hui au Premier ministre un projet de décret refusant l’acquisition de la nationalité française par un ressortissant étranger marié à une Française, au motif qu’il est apparu, lors de l’enquête réglementaire et de l’entretien préalable, que cette personne imposait à son épouse le port du voile intégral, la privait de la liberté d’aller et venir à visage découvert, et rejetait les principes de laïcité et d’égalité entre homme et femme."Si le mari, étranger, force sa femme, étrangère, à porter le voile, on fait quoi ?
Ensemble, tout est possible.
Même le pire.