Gilles Siméoni et Jean-Christophe ont rédigé une lettre commune qui a été envoyée au Président de la République à la veille de sa visite en Corse demain. Cette lettre ouverte à la presse, a également été signée par 120 élus. La voici en intégralité.
"Monsieur le Président de la République, Le courant d'idées auquel nous appartenons s'est battu depuis des décennies pour défendre le droit de la Corse au développement durable, s'opposant par exemple dans les années 60 à l'implantation prévue d'un site d'expérimentation nucléaire à l'Argentella, ou combattant pour la défense de la Méditerranée contre les Boues Rouges.
Récemment, nous avons largement contribué à une mobilisation politique et citoyenne, qui a permis d'éviter l'implantation d'un incinérateur pour déchets ménagers dans l'île. Nous avons également participé pleinement aux combats contre les centrales au fioul lourd, ou le passage des pétroliers dans les Bouches de Bonifaziu. Enfin, de nombreuses forces de ce pays, dans leur diversité, se sont unies pour faire barrage au projet de PADDUC concocté par l'actuelle majorité territoriale.
À chaque fois que notre île a eu à défendre son patrimoine collectif, elle l'a fait contre des projets inspirés ou soutenus par l'Etat, et un certain nombre de groupes financiers. Au regard de ce passé conflictuel, ancien et récent, c'est avec une certaine réserve que nous attendons de prendre connaissance de votre vision du développement durable de la Corse. Nos choix fondamentaux, eux, sont parfaitement connus des corses. Nous tenons cependant, à l'occasion de votre visite, dans un esprit de dialogue, à les rappeler brièvement.
1) Le développement durable place l'homme au centre des choix politiques essentiels. L'histoire le démontre : le peuple corse est une réalité originale, vivante, ouverte et capable d'intégrer celles et ceux qui le souhaitent dans une communauté de destin. Il faut donner à ce peuple les moyens juridiques et financiers de garantir et renforcer les éléments constitutifs de son identité : la langue, la culture, la terre.
2) Le développement durable organise la prise en compte de l'intérêt général dans la gestion des secteurs stratégiques d'un pays. L'eau est, en Corse, une richesse naturelle abondante : elle ne peut être exploitée dans une logique de privatisation. Les transports sont, pour un territoire insulaire, la clé essentielle de l'ouverture : la notion de compétitivité doit toujours être conciliée avec des exigences fortes de service public, et de non-dépendance. Enfin, l'autonomie énergétique de l'île est une nécessité absolue. Elle doit être atteinte à travers le GALSI, mais aussi par le développement des énergies renouvelables dans leur diversité (photovoltaïque solaire, thermodynamie, hydroélectrique, éolien, biomasse).
3) Le développement durable crée de la richesse en préservant les équilibres territoriaux, naturels et humains. La Corse est aujourd'hui en proie à la spéculation, à la bétonisation du littoral et à la mise à mort de l'intérieur. Nous voulons rompre avec ce modèle archaïque et le remplacer par une stratégie économique ouverte sur notre environnement euro-méditerranéen reposant sur trois piliers : d'abord le rééquilibrage en faveur de l'intérieur, qui doit faire l'objet d'un véritable plan de relance. Ensuite, la préservation et la mise en valeur de la première de nos richesses : notre patrimoine environnemental, qui nous permettra de développer des activités entrepreneuriales, agricoles et touristiques créatrices d'emplois qualifiés et de valeur ajoutée. Enfin, il faut replacer la solidarité au cœur des politiques publiques : l'exclusion, le chômage, la précarité frappent durement les Corses. La question sociale est, ici comme ailleurs, une priorité absolue.
4) Le développement durable, c'est aussi vivre dans une sociétéapaisée, construite sur les valeurs positives de travail, de tolérance, de justice. Nous avons pour notre part fait le choix exclusif de l'action publique. Mais nous savons aussi que la Corse vit depuis trop longtemps dans une situation de conflits, du fait notamment de l'absence de dialogue organisé et durable entre l'état et notre communauté. Nous souhaitons œuvrer résolument à la construction de ce dialogue, qui ne doit exclure personne, et à l'avènement de la paix. Oui, les conditions de l'affrontement doivent disparaître. Et elles ne disparaîtront que si tous les acteurs parviennent à s'entendre sur une solution politique raisonnable et transactionnelle.
C'est ce chemin que, pour notre part, nous vous demandons d'emprunter. C'est celui que nous continuerons inlassablement de proposer à notre peuple, à l'occasion notamment des échéances de mars 2010".
Gilles SIMEONI - Jean-Christophe ANGELINI (Candidats à l'élection territoriale de Mars 2010)