Sans même un soupçon de doute, Jeandler a trouvé. Impressionnant!
Bien entendu, le libellé de l’énigme jouait avec l’âme…Ah! L’âme! L’âme des violons, tout d’abord. Cachée, mystérieuse, puisque sans elle, on s’en doute, les vibrations des sanglots longs nous toucheraient bien peu. Et pourtant! Bien tangible et concrète, cette âme, puisqu’il s’agit d’une petite pièce cylindrique en bois…
Celles, “sans vie”, achetées, âmes mortes , renvoyaient à la manipulation opérée par Tchitchikov, le triste héros de Gogol (1809-1852). Dans son roman, l’âme ne répond pas à la définition de Platon: “un mouvement qui se meut soi-même” (Phèdre, 245c-246& ; Lois, X, 896a), ressemblant aux Idées, aux formes idéales, au divin. Non, il s’agit d’un terme administratif pour désigner les serfs d’une propriété dans la Russie des tsars.
Voici de quoi il s’agit:
“Tous les 5 ans l’empire russe procédait à un recensement de tous les serfs que chaque propriétaire possédait. Au bout de la 4ème année il y avait déjà des changements (morts et naissances). Administrativement les gens qui étaient morts étaient considérés comme vivants et leur propriétaire devait payer des impôts au vu de leur nombre. Le héros va sillonner la Russie profonde pour racheter à leurs propriétaires les âmes mortes sur lesquelles ils ne seront donc plus imposés. A la fin il se trouve à la tête d’une liste de gens qui officiellement sont vivants, il les hypothèquera à la banque et touchera ainsi une somme importante… L’intérêt de l’œuvre c’est la galerie de portraits, de personnages de la Russie profonde qui sont bien typés: tous font preuve de lâcheté dans ce marché qui est malhonnête. Ils ne sont pas beaux à voir, y compris le héros lui-même: mais lui au moins il le sait.”
Paragraphe emprunté à ce site
Le plus étonnant est que Gogol ne voulait nullement se montrer critique. Il souhaitait avant tout faire rire. Son oeuvre novatrice a porté bien au-delà et influencé les plus grands écrivains russes.