Au puit de la luxure # Chronique 30

Publié le 29 janvier 2010 par Katrin
Anne Bert, pour sa première publication aux Editions Blanche, nous met « l’eau à la bouche » avec vingt-quatre petites histoires, qui sont autant de portraits de femmes osant un désir exacerbé et mettant au cœur de leur vie la recherche d’un plaisir absolu.
Loin des clichés d’une pornographie au sexe épilé et aux lieux aseptisés, les femmes sont de belles et sauvages amazones, félines et tigresses… Les visages sont multiples et uniques, d’une violente sensualité : une vigneronne « vouivre » qui copule dans l’étang et se gorge de raisin; une lectrice d’Alina Reyes dans un train qui subjugue un passager ; une femme glaciale, que rien ne semble faire frémir, provoquant une fureur érotique ; Alice ravie dans les bras d’un Morphée géant ; une inconnue sur un banc public dans le jardin des délices…
Toutes offrent des croupes joufflues, des sexes aux forêts luxuriantes, des bouches cannibales ;  elles puent le désir et leur jouissance sonore, qu’elle soit solitaire, à deux ou à plusieurs, embaume toujours de mousses, d’humus, et de marécages.
Car ce qui nous envoûte à la lecture de ce texte, c’est bel et bien le bruit de succion des mots, leurs saveurs et leurs « arômes obscènes ». La bouche du désir et la langue des mots s’entremêlent, s’avalent, s’aspirent, se crachent, s’arrachent des soupirs et des extases. La plume trempe dans la glaise des corps, fouille les fentes et les trous, barbouille des calligraphies  charnelles et joue de toutes les nuances de l’alphabet érotique.  En explorant la chair des mots, Anne Bert invite son lecteur à perdre pied dans les labyrinthes initiatiques du désir et met vraiment « le foutre à la bouche ».
 
« L’eau à la Bouche » – Anne Bert. Editions Blanche, 2009

Copyright Katrin Alexandre 2009 pour le Magazine des Livres