Nicolas Sarkozy lundi soir, Jean-Louis Borloo mercredi soir, les boulettes sont parfois grosses en Sarkofrance.
Sarko, boulette sur le chômage.
Lundi soir, la véritable et unique annonce de Nicolas Sarkozy dans l’émission « Paroles de Français » sur TF1 fut sa promesse que le chômage allait bientôt baisser. Le président avait sous la main les dernières statistiques, dévoilées ce mercredi 27 janvier : 18 700 de chômeurs en moins en décembre, soit -0,7%. Sur un an, les chômeurs de catégorie A (i.e. sans aucune activité) ont progressé de 18%. Si l'on intègre les demandeurs d'emploi en activité réduite, le chômage a continué d'augmenter en décembre (+8 600 personnes), soit +587 000 inscrits sur un an. La catégorie D (sans emploi et sans recherche active) a cru de +4,5% en décembre, pour totaliser 228 000 personnes en fin d'année. Et il faudrait ajouter les "chômeurs cachés", c'est-à-dire les non inscrits et les salariés en chômage partiel dans les entreprises. Il faut ainsi lire les statistiques officielles jusqu'au bout, comme au paragraphe 6a du document publié ce mercredi par le ministère du travail: en décembre, les radiations administratives ont progressé de ... +11,1%, soit 42 000 personnes sur le seul mois de décembre. Les radiations n'étaient "que" 38 000 le mois précédent. Voici comment le chômage "recule". Les "cessations d'inscription pour défaut d'actualisation" restent à un niveau élevé : 197 000 en décembre (207 000 en novembre 2009), contre 162 000 au plus fort de la crise, en décembre 2008.
Sarko, boulette sur les impôts
Cédric Mathiot, à Libération, a décrypté une autre boulette présidentielle : «En matière d’impôt, la France est le pays de l’OCDE qui a les impôts les plus lourds. Nous sommes à 40,7%, sept points au-dessus des Allemands.» Et bien, c'est faux. La France est largement dépassé, en matière de prélèvements obligatoires, par la Suède, le Danemark, la Belgique et la Norvège. de surcroît, rappelle justement le journaliste, les comparaisons internationales des taux de prélèvements obligatoires sont très hasardeuses. Les périmètres de prestations et d'assurance sociale ne sont souvent pas comparables, comme, par exemple, avec les Etats Unis, où la protection sociale est souvent du ressort des régimes d'entreprises, sans donc transiter par les comptes publics.
Jeudi, Nicolas Sarkozy tenait une «conférence» sur les déficits à l'Elysée. Les élus de gauche ont boycotté la réunion. Le président français tente de faire croire, UMP à l'appui, que les collectivités locales, majoritairement à gauche, sont responsables des déficits publics. C'est faux. La dette publique atteint 1 457 milliards d'euros en 2009, dont 80% provient de l'Etat (1 159 milliards), et les collectivités locales pour ... 10%. En 2008, le déficit budgétaire de l'Etat, après une année pleine de gestion sarkozyenne, était déjà de 56 milliards d'euros, six plus que celui des collectivités locales. Eric Woerth, le ministre du budget se défend : «L'Etat a versé en 2009 plus de 90 milliards d'euros aux collectivités totales. S'il ne l'avait pas fait, son déficit serait inférieur d'autant.» Le trésoriier de l'UMP omet volontairement de préciser que 50 milliards d'euros correspondent à la dotation globale de fonctionnement versée en lieu et place d'impôts locaux supprimés par ... le gouvernement. S'ajoutent d'autres dotations, compensant d'autres transferts de charges, sur fonds de polémiques : la progression des dépenses locales, qui n'est contestée par personne, tient à la progression du coût des dispositifs sociaux qui ont été transférés aux collectivités locales (APA, RMI, RSA, etc).
Borloo, nouvelle boulette
Jean-Louis Borloo vient de revenir de Copenhague, au moins psychologiquement. Il lui a fallu des semaines pour livrer son interprétation du sommet, et de son (absence de) résultat. Mercredi, le ministre parlait devant la commission du développement durable de l’Assemblée Nationale. La surprise fut de taille. Selon lui, Copenhague a été « un succès majeur » : « L'enjeu était bien d'accrocher à ce mouvement à la fois les très puissants émergents - Chine, Inde, Brésil, Afrique du Sud etc...- et les Etats-Unis. Et, de ce point de vue là, Copenhague est un succès majeur ». Borloo cite aussi les engagements de financement de l'aide aux pays les plus vulnérables à court terme (10 milliards de dollars par an sur 2010, 2011 et 2012) et à moyen terme (100 milliards de dollars par an à l'horizon 2020).
Le 20 janvier dernier, Jean-Michel Debrat, directeur général adjoint de l’Agence française de développement (AFD) expliquait déjà, devant la même commission : « Force est de constater que les résultats ont été en deçà des attentes, notamment celle, largement relayée par la presse, de l’engagement formel des parties d’abaisser de moitié les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050. Pour autant, quantité de dispositions prises vont dans le bon sens et le texte final, s’il ne contient pas cet objectif clé, comporte néanmoins beaucoup d’avancées. La nécessité d’une politique mondiale d’adaptation aux changements climatiques a été clairement reconnue. »
Jean-Michel Debrat ne cite ensuite que deux avancées de Copenhague : le problème du financement des réponses aux urgences climatiques a été « posé », tout comme l’enjeu de lutter pour la préservation des forêts, mentionné dans le communiqué final du sommet. Maigre bilan. Debrat reconnaît que l’Europe a été défaillantye. Les Etats membres ont chacun joué leur partie (n’est-ce pas M. Sarkozy ?), et la présidence de l’UE a été « défaillante ».