Toussaint Louverture
Ils sont venus, ils sont tous là : Les USA, le Canada, le Brésil, la France, l'Onu... Venus se pencher au chevet d'un pays malade de la misère, de la corruption, du despotisme, et des catastrophes naturelles (qui vont si bien ensemble, comme les cavaliser de l'apocalypse) depuis deux siècles. Seul pays à s'être libéré seul des chaînes de l'esclavage, après avoir repoussé le corps expéditionnaire envoyé par Napoléon, proclamant son indépendance en 1804, Saint-Domingue (son nom d'alors) a alors très mal commencé sa vie de république libre. Ce n'est qu'en 1825 que le roi Charles X accepte l'indépendance d'Haïti, contre 150 000 francs or, l'équivalent de plusieurs milliards d'euros d'aujourd'hui, pour "indemniser" les colons blancs chassés...
Une dette qui plombe dès le début la jeune république, et qui va laisser des traces jusqu'à aujourd'hui. Les Etats-Unis, pays esclavagiste, ne voient pas d'un bon oeil ce mauvais exemple, tout proche de leurs côtes. En 1915, les troupes américaines envahissent Haïti, qu'ils occuperont jusqu'en 1934. Après... après, c'est le chaos, guerres civiles, coups d'Etats, assassinats de présidents... Jusqu'à l'arrivée de Duvalier, dictateur sanglant, bien vu des USA, qui craignent surtout la contagion communiste de Cuba. Un règne de 14 ans, marqué par les massacres perpétrés par les tristements célèbres tontons macoutes. Son fils "bébé doc" lui succède en 1971, et est chassé du pouvoir en 1986. Il se réfugie... en France, comme bon nombre de dictateurs déchus. On est la patrie des droits de l'homme, oui ou non ? C'est pas Hortefeux qui nous contredira...
Haïti sort de ces années d'enfer exsangue. Le pillage de ses rares ressources se poursuivra grâce aux amis américains, ceux-là mêmes qui organisent les secours aujourd'hui. Il est piquant de voir que les deux nations qui ont conduit Haïti à l'extrême pauvreté se disputent aujourd'hui avec indécence le privilège de le secourir. "Haïti vient de compter 206 années d'indépendance et le pays continue à souffrir de tous les maux de l'esclavage et du colonialisme, à la suite de la domination brutale et insidieuse des pays impérialistes", estime le journaliste Berthony Dupont, d'Haïti Liberté (USA), cité par Courrier international. Qui ajoute que "les pays capitalistes exploiteurs des richesses du sous-sol haïtien vont venir hypocritement à notre secours". "Non pas que nous rejetions d'un revers de main leur aide, non, mais nous la voulons fraternelle, désintéressée", conclut-il. Comme si Les Etats-Unis et la France agissaient jamais dans un but intéressé...
François GILLET