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Réflexion à partir d'une lecture.

Par Ananda

Aujourd’hui, nous vivons ce que le sociologue péruvien Anibal QUIJANO appelle la "colonialité du pouvoir", c’est-à-dire que nous vivons dans un monde qui est toujours fondamentalement colonial, un monde dans lequel les centres sont toujours les pays industrialisés et les grandes villes de populations européennes, tandis que les périphéries restent pour l’essentiel de population non-européenne. La relation centre-périphérie est une relation d’exploitation et de domination qui dure depuis 400 ans de colonialisme. Aujourd’hui, alors que la domination coloniale, du point de vue institutionnel, a été éliminée, la structure globale qui a été mise en place pendant ces quatre-cent ans de colonialisme existe toujours. C’est ce qu’Anibal QUIJANO appelle la colonialité : des relations coloniales sans administrations coloniales. L’exploitation du Sud par le Nord, l’exploitation des Non-Européens par les Européens existe toujours. La richesse du monde passe, historiquement, des mains non-européennes aux mains européennes. Quand je parle d’Européen, je parle aussi bien sûr des Etats-unis et des Euro-Américains comme d’une continuité du projet européen. Les relations hiérarchiques qui ont toujours eu cours dans l’histoire coloniale perdurent jusqu’à aujourd’hui, avec l’existence des Etats-Nations et du discours développementaliste. Les populations du Tiers-Monde croient aujourd’hui qu’elles détiennent une véritable souveraineté, qu’elles ont la possibilité de se développer, et que les problèmes existants au sein de leurs frontières sont des problèmes circonscrits à leurs propres Etats-Nations. En fait, les problèmes de sous-développement sont des problèmes globaux, qui incluent les relations Nord-Sud. Les causes du sous-développement liées à la colonialité des échanges économiques mondiaux restent donc invisibles, parce que l’attention se porte sur les frontières des Etats-Nations, sur les territoires nationaux et leur prétendue souveraineté. En fait, au delà des Etats-Nations, au niveau international et global, dans un contexte dans lequel les firmes multinationales et les acteurs financiers globaux prennent le pas sur les Etats, les relations d’exploitation et de domination entre le Nord et le Sud, déterminent le destin des pays du Tiers-Monde, destin qui se joue bien au delà des frontières nationales.

Extrait d'une interview de Ramon Grosfoguel, chercheur en sciences politiques et sociologie,  enseignant à l’Université de Californie-Berkeley dans le département des études ethniques ( publications : " Colonial Subjects : Puerto Ricans in a Global Perspective" - University of California Press, 2003 et "Latinos In The World-System : Decolonization Struggles In The In Twenty-First Century U.S. Empire" , ed., avec Nelson Maldonado-Torres et José David Saldívar ; Paradigm Publishers, 2005) publiée sur le site http://www.indigenes-republique.fr/


Réflexion :

L'Homme Blanc se croit, au fond, seul propriétaire de l'Humanité.
A lui la parole. A lui seul.
Il représente le Bien, dont les principaux piliers, on le sait, sont la démocratie (telle qu'il la pratique),  et la richesse, l'abondance en capitaux et en biens matériels.
Il a été l'auteur (ça s'est trouvé comme ça) des formidables découvertes de la science et de la technique dites "modernes".
Il a tout : l'argent, le savoir et tout ce qui lui permet de dominer outrageusement le monde avec un sentiment de supériorité "légitime".
Pourtant, en même temps, il a asservi et génocidé à tour de bras; il a destabilisé et pillé des continents entiers à son seul et unique profit. Il les a tous étouffés peu à peu dans son gigantesque cancer de pugnacité, d'avidité.
Sans le pillage de ces continents (lequel, d'ailleurs, comme il nous est dit plus haut, se poursuit allègrement, sous nos yeux, aujourd'hui), que serait-il ?

Il se gargarise de sa grandeur, qui le dispense de toute empathie, de toute compréhension réelles des souffrances qu'il a infligées : apauvrissement et complexes d'infériorité destructeurs.
Après tout le dur labeur qu'il a mené depuis le XVIème siècle, il entend à présent profiter de l'ensemble du monde, qui lui appartient de plein droit (de plein droit du plus fort , qui est forcément le Meilleur).
Dans ces conditions, comment accorder un véritable crédit aux idéaux qu'il met en avant et, notamment, à la notion d'"humanisme" ?
L'humanisme, inventé à Florence, à l'aube du XVIème siècle, cependant que l'Europe boutait toute forme d'altérité hors de son sol (expulsion des Maures d'Espagne). L'humanisme, héritier du message chrétien de l'Homme-dieu.
Eh bien, oui, l'Occident a réussi sa croisade humaniste : l'Homme-dieu a tué dieu et a crucifié la planète Terre.
L'Homme Blanc le sait si bien qu'il est hanté de mauvaise conscience, ce qui empire encore les choses. La mauvaise conscience gâche sa jouissance individualiste-hédoniste.
Eh oui, il y a encore, sur la planète, des milliers de gens qui ne vivent pas, ne pensent pas comme lui !
Le mode de vie "idéal" qu'il prétend proposer à l'ensemble de l'humanité (travail-consommation-loisirs-usage des hautes technologies) ne pourra jamais, il le sait, être accessible aux 6 milliard d'Hommes sans que la planète Terre n'en arrive à la catastrophe.
Alors, il fait l'autruche : il refuse d'admettre les faits, qui sont pourtant criants :
1) son humanisme si beau, si grandiose, c'est par la force qu'il l'a imposé.
2) qu'il le veuille ou non, il appartient à une minorité privilégiée, laquelle profite à plein - en haut de l'échelle sociale mondiale qu'elle se trouve - d'un système néo-colonial mondialiste contrôlé par le "Marché" (banques) et les grandes firmes "multinationales".


P.L

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