Céline Minard réussit dans Olimpia ce qu'elle avait à mon goût manqué avec Bastard Battle dans son travail de dynamitage de la langue. Là où cela ne fonctionnait pas avec la langue du moyen âge parvient ici avec le jeu sur le baroque à une véritable explosion, ça va dans tous les sens et ça touche à chaque fois. C'est juste, profond et fort. le Baroque permet tous les excès et les outrages que Minard fait subir à la langue.
Olimpia Maidalchini (1592-1657) me semble être un personnage extraordinaire pour un romancier, née de rien elle se hisse par pure ambition et soif de pouvoir au plus haut rang de son temps (dans une alcôve derrière le trône du pape Innocent X), elle devient papesse à la place du pape. Mais ce genre de pouvoir dans l'ombre ne supporte pas la lumière et à la mort du pape, on lui fait perdre plus qu'elle n'a eu dans toute sa vie.
Le roman de Minard tient tout entier dans un monologue, et dans une courte biographie qui vient mettre astucieusement le personnage en perspective. Il y a là un beau travail sur l'intérieur et l'extérieur du personnage qui ose aller au bout de sa folie.
Roman bref, la diatribe d'Olimpia est une logorrhée violente et haineuse contre ce monde qu'elle pensait contrôler. Le monologue tire sa force de la haine et de la colère, chevillée au corps de cette femme qui a tout perdu. La violence de son propos est proportionnellement égale à ce monde de pouvoir qui vient de s'effondrer de se dérober à ses pieds.
Olimpia au moment ou elle parle est une femme brisée, sa langue est faite de chair de sueur et de sang, elle pue aussi fort que la rage qui l'habite. Il y a dans les propos d'Olimpia qui sont d'une grande violence un pouvoir hypnotique enivrant et capiteux.