J'avais, à l'occasion de la présentation du lauréat du Prix du Ministre de l'Agriculture, évoqué les concours (hinpyô-kai 品評会) de thé japonais, sorte de concours agricoles, qui ont lieu à l'automne.
Il existe le concours général, le plus prestigieux, celui de Tôkyô, celui de Shizuoka, celui du Kansai, etc.
Les thés japonais qui y sont présentés sont bien sûr le fruit d'une attention toute particulière des producteurs, produits en quantité infime dans le seul but de concourir.
Il y a les catégories sencha, gyokuro, kama-iri cha, etc. Les thés sont notés sur 200, note résultat de la somme des points obtenu sur 5 critères : aspect extérieur, parfum, couleur, saveur, aspect des feuilles infusées.
Les thés sont enfin vendus aux enchères.
Là où je pense qu'il est important d'apporter une précision c'est sur le point suivant. Si les quelques thés arrivés en tête partent à des prix très important, il est intéressant de voir que d'une manière générale, le prix n'est pas nécessairement proportionnel à la note obtenue. Il est tout à fait fréquent de voir un thé noté par exemple 110, être acheté bien plus cher qu'un autre noté 115. Tel ou tel grossiste, ou même détaillant, peu penser que celui à 110 est plus intéressant, ou plus adapté à sa clientèle. Voilà une chose finalement évidente.
Ce qu'il faut savoir c'est que ces concours sont les descendants directs des concours créés à la fin du 19ème siècle, durant l'ère Meiji, à une époque où le sencha était un très important produit d'exportation. Je m'éloigne un peu du sujet, mais je suis fasciné par cet aspect de l'histoire du thé japonais. Ce produit, fut, après la soie, le 2ème moteur de la croissance du Japon. On parle beaucoup du thé japonais comme d'une expression très importante de la culture du Japon, mais dans le cas du sencha, qui ne fait sont apparition qu'au 18ème siècle, et ne sera vraiment consommé par les japonais qu'à partir des années 60, ont a surtout un produit dont l'influence fut probablement décisive dans ce qu'est aujourd'hui le Japon d'un point de vu économique sur la scène mondiale !
Mais revenons à nos concours, donc, ils sont créés par le gouvernement de l'époque dans le but de récompenser les meilleurs cultivateurs / producteurs de sencha. C'est à dire en fait, de participer à la diffusion des techniques de production de ce thé. A une époque où il existe un tas de thés régionaux très différents, il faut développer la production du sencha, l'encourager, et faire en sorte que les techniques se diffusent, pour avoir une grande quantité de sencha de haute qualité propre à satisfaire les importateurs occidentaux, essentiellement américains. Le revers de la médaille fut bien sûr la disparition progressive de nos thés régionaux traditionnels.
Ainsi, les critères de notation sont bien sûr basés sur des caractéristiques propres à un thé produits de la manière dont il doit être produit.
Aujourd'hui encore, c'est de cette manière que sont appréhendés les thés qui concourent. La meilleur note ne correspond pas au meilleur thé (ceci est de toute façon fort relatif), mais au thé qui semble le résultat d'une méthode de production exemplaire. Ce ne sont pas les thés qui sont notés, mais au travers d'eux, les producteurs eux-mêmes.
Pour finir, il faut donc voir ces concours comme comme quelque chose d'interne à l'industrie du thé au Japon, qui ne sont pas destinés directement au consommateur.