Deux envois : l¹un aux lecteurs, l¹autre aux touristes ! ouvrent la lecture de ce copieux ouvrage de plus de 400 pages. L¹auteur se présente d¹emblée soucieux de la problématique de l¹homme moderne :
La composition de cet ouvrage nous a confrontés à deux options: le texte serait ou bien rédigé pour satisfaire les personnes pressées ou alors destiné aux doctes et à ceux qui veulent approfondir l'alchimie et les symboles architecturaux. Chacun des procédés a son intérêt et son public, mais il fallait choisir une orientation susceptible de satisfaire le plus grand nombre sans défigurer pour autant l'art d'Hermès. Nous avons préféré rédiger un livre traitant aussi bien le fond du sujet - sans nous embarrasser pour autant d'une complexité légendaire en ce domaine - que la dimension touristique rapidement compulsée par les non initiés.
Cette dimension touristique s¹illustre malheureusement par de très mauvaises reproductions en noir et blanc des principaux monuments de la ville de Montpellier que l¹auteur décrit avec une phraséologie alchimique qui n¹appartient qu¹à lui. L¹alchimie dont nous entretient doctement Léon Gineste n¹est en fait que la référence aux bizarres manipulations métallurgiques du maître dont il se recommande au bout de quelques pages : Monseigneur Caro. Il s¹agit de Roger Caro, pseudo-alchimiste contemporain, radiesthésiste et Patriarche-impérator des Frères Ainés de la Rose-Croix (F.A.R+C) société dont nul n¹avait jamais entendu parler auparavant, il fut également le fondateur et le patriarche-archevêque de l¹Eglise universelle de la Nouvelle Allliance.
C¹est le lieu de rappeler une des plus anciennes et des plus concises définition de l¹alchimie : elle est la science dont le but est d'arracher l'accident qui a perverti la matière en en faussant la pureté naturelle dont Allah l'avait dotée on la doit à l'émir égyptien Aydamur Jildaki (XIVè siècle. Ce que notre auteur appelle voie du cinabre - le cinabre étant le nom commun du sulfure de mercure - vient de son interprétation matérialiste de l¹unique matière première que les achimistes prétent à l¹élaboration des métaux dans le sein de la terre et qu¹ils appellent : mercure, la semence fertilisante de tous les métaux.
Dans cet ouvrage foisonnant on trouve : une évocation de la première Église des gaules mentionnée dans la Bible, mais c'est selon lui une erreur de s'imaginer qu'il s'agit de la Galatie orientale ! Des considérations paranoïaques sur la science officielle, une initiation à la langue des oiseaux, mais aussi une démonstration délirante de la constitution d'une école alchimique à Montpellier par les juifs et les tziganes principalement.
Le plus désopilant est sa vision de la fameuse langue des oiseaux utilisée, selon lui, par les alchimistes. Le premier a avoir introduit ce concept c¹est Fulcanelli dans des ouvrages célèbres publiés au début du vingtième siècle : Le Mystère des cathédrales et les Demeures Philosophales. Il s¹inspirait des "Matériaux Cryptographiques" de Grasset d'Orcet (1828 - 1900), archéologue et mythologue français, créateur d¹une cabale phonétique basée sur l¹assonance, les anagrammes et les jeux de mots et calambours pour déchiffrer les vestiges du passé. Cyrano de Bergerac que l¹on fait passer dans les milieux ³ésotéristes² comme un adepte de l¹alchimie avait djà décrit dans son ouvrage : Les Etats et empires du soleil sa rencontre avec un oiseau merveilleux qui lui parlait en chantant et qui citait des poètes ayant réussi à parler la langue des oiseaux tel Apollonius de Tyane.
L¹auteur mélange ce concept avec celui de langue des chevaux, le cheval désignant cette cabale : ... la perdrix grise, la plus commune, porte sur la poitrine une tache sombre en forme de fer à cheval. La perdrix représente la rencontre entre la langue du cheval et celle des oiseaux. Cabalistiquement la perdrix est un corps double (pair) qui tourne (drill).
Citons d¹autres savoureux exemples extraits de son Glossaire alchimique :
GRENOUILLE : Outre le feu lévogyre, elle représente la granulation enrobée de vase verte. Son cri printanier signale le moment où l'alchimiste doit entrer au laboratoire. Sa présence dans le bénitier de l'église Saint Roch signifie qu'il faut baigner la granulation avec du sel liquide. "
LANGUE OUVERTE : Synonyme de langue verte.
LATIN : Sel médium. Latin étant l'anagramme de liant.
LICORNE : C'est lire cornu et aussi le corps mis à nu ou débarrassé de ses impuretés par une pulvérisation avant de l'introduire dans la cornue pour une distillation sans l'aide du feu. La partie chevaline du quadrupède est en rapport avec les quatre éléments qui font progresser le Grand OEuvre, et avec la dimension cabalistique qui permet au cerveau de s'ouvrir et d'établir une joncfion avec d'autres espaces.
LYRE : Instrument de musique qui conseille de lire la sonorité des mots. Il correspond aussi à la constellation du même nom dont l'étoile principale est Véga. L'ire est la colère en rapport étroit avec le feu de nature et la bioénergie.
RAT : Si le rat est l'anagramme de l'art, le "raton" est "l'orant".
Nous concluerons notre examen de ce livre particulièrement indigeste en présentant aux lecteurs un extrait qui nous apparaît résumer la pensée de l¹auteur :
De l'Inde, berceau du Bouddhisme et Taoïsme et donc de l'alchimie du cinabre, migrèrent avec leur savoir - au IVe siècle - les tribus d'Indous, du nord-ouest du pays, essentiellement les Manouches, détenteurs des lois de la création ou lois de Manou. Ils choisirent, comme lieu de ralliement, Sainte-Marie de la Mer, endroit sanctifié par eux où fut fondée, au premier siècle par les Saintes-Maries - disciples du Christ - et certains Apôtres, l'Église chrétienne mystique la plus ancienne (établie avant celle de Rome) ou Église Gallicane. Rappelons que la fille aînée de l'Église (1) avait un rituel structuré, pour une pertinente raison, avec des textes alchimiques d'Alexandrie. C'est cette même raison qui conduisit le Baron de Tchoudy, bien connu dans certains milieux de la Franc Maçonnerie, à écrire - en 1769 - un rite Maçonnique Alchimique réservé à l'élite des hauts grades.(1) le nom de « Fille aînée de l'Église » est celui de l'ancienne Église de France ou Gallicane. L'Église actuelle est l'Église romaine « d'occupation » et n'est donc pas la fille aînée de l'Église ».
Plus tard, la présence de l'alchimie à Montpellier ne pouvait que s'accentuer par les multiples voyages à Alexandrie et dans les ports orientaux des galées de Jacques Coeur rétablissant un puissant lien entre le savoir de son époque et les cultures orientales.
Enfin s'établit une relation entre l'école d'alchimie de Montpellier et le trésor de Rennes le Château, ce qui inscrit la ville au coeur de l'un des plus grands mystères de l'Europe.
Les nombreux alchimistes réputés qui fréquentèrent l'université diffusèrent leurs connaissances dans tout le pays et ailleurs. Le message architectural témoigne du bouillonnement culturel en hermétisme qui caractérisait la ville et en fit un véritable creuset des connaissances ancestrales et aussi une capitale de l'alchimie, à l'instar d'Alexandrie, Saint-Jacques-de-Compostelle, Tolède ou Prague. (page : 107)
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