» Fish Tank » de Andrea Arnold
Sortie cinéma : 16 septembre 2009
Disponible en DVD le : 3 février 2010
Je ne sais pas grand-chose de cette jeune réalisatrice qui signe là, son second long métrage, après « Red Road » (2006) , prix du jury à Cannes . La même récompense lui a été attribuée pour « Fish Tank » . Deux films, deux grandes distinctions, Andrea Arnold ne fait pas dans la dentelle .
Je ne sais pas non plus quelle fut son adolescence, mais la manière de ramener ses histoires à des rapports mère-fille d’une violence inouïe, aussi bien physique que verbale, laisse entrevoir quelques cicatrices mal fermées . Les deux courts-métrages des bonus , « Wasp » et « Dog » évoquent le même affrontement, la même opposition .
Celle à laquelle est confronté Mia , une ado en mal de repères affectifs face à une mère livrée à elle-même (Kierston Wareing, excellente, car tellement détestable ). La jeune fille ne rêve que de hip-hop et de jours sans contrainte. Quand un nouvel amant Connor , s’introduit dans l’appartement , Mia entrevoit la vie différemment . Katie Jarvis, une débutante dans le septième art, fait une prestation sans faille et se révèle totalement dans l’innocence et la beauté de ses quinze ans .
Sur ce fil fragile et convenu , la réalisatrice anglaise s’échappe des sentiers battus . Elle dresse le portait rebelle et classique de l’adolescence, mais va au-delà en extirpant au sein même de la cellule familiale , le mal-être général de toute une société.
On pense bien évidement à Ken Loach ( des usines à l’abandon, des paysages désolés … ) et à son réalisme social qui chez Andrea Arnold reste quasiment confiné à la sphère familiale. Un huis clos oppressant et paradoxalement libérateur, puisque chacun semble y trouver ses marques . Dont ces gosses de dix ans, aux défenses prodigieuses, ; une résistance à l’abandon et à la solitude , surhumaine.
Katie Jarvis et Michael Fassbender
A l’image des adultes, le casting des minots est impressionnant. « On a déniché Katie Jarvis à la station de Tilbury Town, où elle se disputait avec son petit copain. Elle déborde d’énergie, mais elle a aussi une part de fragilité et d’innocence qui nous convenait » raconte la réalisatrice qui donne de l’épaisseur à sa mise en scène en adoptant le procédé du bout à bout . Aucun acteur ne sait ce qui va se passer par la suite. « Ils devaient se contenter de travailler la scène du moment. Dans la vie, on ne sait jamais ce qui va nous arriver . Je voulais que chaque instant recèle cette innocence. »
L’autre tour de force est d’imaginer un récit , prévisible et qui pourtant dérape à chaque nouvelle séquence. A force de se faire son cinéma, Mia joue les plus mauvais rôles , mais réussit toujours une sorte de happy end bienfaiteur .
Dans « Fish Tank » Connor est un amant pour la mère, un protecteur pour les enfants, un remplaçant fragile d’un père nourricier dont on ne sait rien . Et c’est aussi la force de cette mise en scène , toujours en alerte, de nous laisser ces quelques fêlures intimes . Personnelles, familiales, comme dans la vie dit Andrea Arnold.