Gallimard jeunesse, 2010 - 288 pages - 12,00€
traduit par Cécile Dutheil de la Rochère
Être adulte, était-ce ça ? S'obliger à faire ce qu'on n'avait aucune envie de faire, avec un simple haussement d'épaules ?
Les semaines passent sous un soleil accablant. Les Spooner n'en peuvent plus mais sont comme électrisés par l'ambiance. Ils repoussent leur départ, Evie s'en moque car elle ne veut pas se séparer de Peter. Et pourtant, le tableau des vacances cache aussi des zones de turbulence - les Grayson joueraient un double jeu, Joe est de plus en plus nerveux, Bev s'embellit sous le soleil et s'absente chaque jour pour apprendre le golf, Peter est terriblement beau, séduisant, charmeur mais c'est une bombe à retardement.
Sous ce climat lourd et pesant, la tension monte, donne du suspense au récit, lequel va très mal se terminer, mais le lecteur s'en rend compte tout seul, au fur et à mesure que l'histoire avance, l'amertume gagne du terrain, les masques tombent, certaines révélations apparaissent, les confiances se perdent, et au milieu Evie se prend la plus grande claque de sa vie. Son passage à l'âge adulte résonnera comme une lente tombée du haut d'un ravin, tant elle comprendra qu'autour d'elle il n'y a que duperie, mensonge et trahison. C'est ahurissant, et le décor de l'après-guerre apporte aussi son lot en dramaturgie et autres horreurs à dévoiler, c'est franchement flippant et hallucinant. La voix d'Evie devient encore plus poignante et magnifique, on partage longtemps cette dualité qui naît en elle, en même temps que la tragédie va fragiliser son petit monde.
C'est un roman à lire d'une traite, écrit dans un style proche des films noirs d'après-guerre, classique et envoûtant, aussi amer qu'un chocolat. Une atmosphère à laquelle j'ai été très sensible.