j’en appelle à la douceur
de respirer dans le silence ténu
des flocons entêtés
rengaine tourbillon de la gravité
que dérange seule la force d’ouest
aventure impalpable
mais elle cingle les branches
là-haut la mitraille impavide
éveillant cent mille voix
c’est au Chemin des Dames
la violence écopée de l’air du temps grinçant
sur ses immondes gonds
tonitruante porte à ciel ouvert
qui donne sur le pire et les croix
plantées à demeure
ma douceur se rue mains levées
contre l’enfouissement très tranquille
de vos visages vivants
je parle avec vous pour vous
d’une survie rêvée et caresse vos noms
inscrits au granit
les arbres défaits
tendent leurs bras pour signer votre absence
au siècle à venir
j’en appelle à la passion
qui vous fait revenir de sous la neige
fantômes enfants
au bel été j’y crois à peine
mais là les corbeaux azurés chantent voix brisée
votre destinée nette
étalée en une nappe pure
neige neige sur laquelle nous aurions partagé
et le pain et le vin
oui je vous entends
petits vous aviez l’âge de mes enfants
qui bien protégés
célèbrent dès l’aube
une joie de vivre que vous leur envieriez
à juste titre
dressé entre eux et vous
- vous savez j’ai connu en chair des survivants
qui me parlèrent de vous -
ultime porte-voix
je ne suis que ce corbeau messager qui gratte
l’impeccable blanc
mais pardon de m’éloigner
je périrais de froid comment alors chanter pour vous
la douceur d’exister