Magazine Politique

Banderille n°327 : La nuit, tous les jeunes sont gris

Publié le 21 janvier 2010 par Toreador

« Paso Doble n°165 : Prose sur le désastre d’Haïti | Home

Par Toréador | janvier 22, 2010

Drame de Woippy : qui a fait son travail, qui a démissionné ?

Woippy. Ce nom qui rappelle Burger King ou je ne sais quel club de gym est aujourd’hui l’exemple parfait de ce qui va de travers dans ce pays. C’est un drame qui s’est reproduit déjà des dizaines de fois, presque banal. Des « jeunes » à trois, tous feux éteints, sur une moto volée. Des policiers municipaux. Un accident, un mort. Malek, un jeune « issu de l’immigration » comme on dit. Une marche silencieuse, et puis subitement le déchaînement de violences : 15 véhicules brûlés, un bâtiment social saccagé. Une polémique : qui est responsable ? la routine.

La routine, certes, mais une routine qui explique les tensions à l’œuvre dans ce pays. Aujourd’hui, c’est la police qui doit s’excuser d’avoir fait son travail. Le Monde s’interroge sur les « méthodes » de la police. Les parents et amis hurlent à l’acharnement. Mais qui est responsable ? Un policier qui voit trois jeunes dans la nuit sur un scooter à vive allure a-t-il encore le droit d’allumer son gyrophare et de leur intimer l’ordre de s’arrêter ? Certains disent que non. Je suis sceptique.

Qui va oser le leur dire, à ce couple larmoyant tout à sa colère qui cherche un bouc -émissaire ? Qui va lui tendre le miroir de la culpabilité ? Je vous livre mon opinion. Ce sont les parents les premiers responsables.

Si Malek n’avait pas été complice ou auteur – l’enquête le montrera – d’un vol, ou receleur, il ne serait pas mort.

Si ses parents lui avaient appris les règles basiques de sécurité, il ne serait pas mort. A feux éteints, la nuit, à vive allure…

Si on lui avait enseigné le respect de la police ou de l’autorité, il ne serait pas mort.

Bref, si on l’avait mieux éduqué, il serait sans doute encore là.

Les asociaux

Ensuite, il y a un second fautif dans cette affaire. On les désigne sous « les habitants du quartier », peu nombreux du reste -une dizaine – qui ont méthodiquement saccagé une quinzaine de voitures. Je parlerais plutôt de minorité active pressée d’en découdre. Si encore il était prouvé qu’il y avait eu malveillance de la part de la police ! Mais même pas.

Il est inadmissible, même parce qu’on est fous de douleur, de se comporter en vandales. Sauvageons. Barbares. En plus je ne pense pas que ce soient les plus touchés par le drame qui ont agi ainsi. Qui est responsable de l’existence de ces excités ? La police ? Peut-être, à titre de chiffon rouge. Mais les parents là encore sont les premiers responsables, eux qui n’ont pas su inculquer le respect de la propriété d’autrui. C’est de l’auto-mutilation : ces voitures appartenaient à leurs propres voisins de banlieue !

Comble du comble, ils s’en sont pris à l’école de la seconde chance de Woippy. Celle-là même qui est censé ramener dans l’inclusion ces populations délaissées. Quel tragicomédie : c’est un peu comme un naufragé qui scierait son radeau parce qu’il en a marre du soleil.

Evidemment, ces pyromanes ne seront pas inquiétés. On ne leur a pas tapé dessus, on ne les poursuivra pas. S’ils sont condamnés, ils seront insolvables. Impunité. Il est où l’Etat de droit ?

Les Intouchables

Et puis, mettons les pieds dans le plat. Ne laissons pas le terrain de la lucidité au FN.

Le vrai problème, c’est que ce jeune ne s’appelait pas Martin Dupont et qu’il ne s’agit pas d’un problème généralisable à n’importe quelle région ou village de France. Il n’y a pas un problème avec « la jeunesse ». C’est un concept ça. Les médias ont beau utiliser des litotes ou des mots pudiques pour généraliser, ce genre de trucs ça n’arrive pas dans la classe moyenne intégrée mais dans les minorités visibles mal intégrées.

Alors, il est là notre problème national. D’un coté, on veut intégrer et assimiler, et on multiplie les dispositifs et politiques dispendieuses. Pour quel résultat ? De l’ingratitude, de l’inconscience, de l’automutilation. De l’autre, on veut réprimer, mais ce qui serait considéré comme un acte normal de police sur n’importe quel territoire de la République devient le manifeste d’un Etat fasciste et répressif lorsqu’il s’exerce à l’encontre desdites minorités. Une partie de l’opinion publique se refuse à penser qu’un arabe ou un noir puisse être pris en chasse autrement que pour sa couleur de peau. Pour quel résultat ? De l’incompréhension, de la frustration, de la haine.

C’est ainsi que l’on crée des intouchables. Le mot a un double sens : ils sont intouchables au sens indien du terme, parce qu’ils constituent la partie la moins favorisée du pays, celle victime des brimades des autres castes. Mais ils sont en train de devenir intouchables au sens premier du terme parce que n’importe quel accident devient dérapage et donc polémique. Du coup, ni la police, ni la justice ne peut faire son travail sereinement.

Le jour où la presse titrera « Emeutes communautaires en Moselle après la mort d’un voleur d’origine mahrébine », elle rendra un fier service à ce pays car le débat aura passé une étape. On appellera les problèmes par leur nom. On arrêtera de se payer de mots et de concepts fumeux. La police n’est peut-être pas la solution, mais certainement pas le problème non plus.

Alors, là, peut-être, rêvons un peu, on pourra tenter de le résoudre.

Allez lire P. Sage.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Toreador 41 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines