La science-fiction accapare tant le cosmos que la « littérature blanche » se tient, face à tant de babillage, bien silencieuse. Hugo Boris est bien placé pour le savoir… Pendant deux à trois ans, il a tout épluché sur l’espace. Il a poussé son enquête jusqu’à la Cité des étoiles à Moscou, jusqu’à discuter avec Jean-Pierre Haigneré (entre autres cosmonautes), ou à assister au décollage d’une fusée à Baïkonour (Kazakstan). L’écrivain a tant est si bien cherché que tout ce qui se trouve dans son dernier roman est fictif, mais vraisemblable… Pourtant, tout au long de la lecture, on se dit que le romancier, tout imaginatif qu’il est, fabule : les cosmonautes ne boivent ni fument en orbite, on ne les imagine pas avec des armes dans leur cabine ou à tomber baba d’affection devant de gluants batraciens. Et pourtant, l’écrivain le certifie, les cosmonautes lui ont dit tout ceci… et les films porno, qui servent, avant
Car en plus d’être un formidable documentaire sur la vie en station spatiale, un roman aux personnages bien campés et émouvants, Je n’ai pas dansé depuis longtemps est aussi une réflexion sur la condition humaine : qu’est ce qui fait de nous des Hommes ? Avant le langage, la conscience et la pensée, n’est-ce pas la verticalité qui nous a différenciés du singe, le port de tête qui a permis tout le reste ? Que serions-nous sans la Terre ? Que serions-nous sans la gravité ? se demande Hugo Boris qui en est, lui, complètement empli, lui qui fouille ses sujets à fond, qui traque avec acharnement le mot juste «parce que la poésie est dans la précision» et qui n’a de cesse de roman en roman, de changer de décor pour «acheter sa liberté d’auteur».
Je n’ai pas dansé depuis longtemps, d’Hugo Boris, Ed Belfond, 391 p, janvier 2010.