La rivalité entre EDF et AREVA, entre Henri Proglio et Anne Lauvergeon pour savoir qui sera le chef et donc le (ou la) mieux payé(e), fait penser à l’un de ces navets dont le cinéma français a le secret, genre qui vous vident aussi surement les salles obscures qu’ils vous remplissent d’éloges les rubriques cinoche du Nouvel Obs et de Télérama.
Henri, François, Anne et les autres… Un titre accrocheur pour un scénario intimiste, tout dans le feutré et la peinture pointilliste des ravages de la marchandisation de l’énergie sur la société contemporaine.
Une intrigue toute en subtilités psychologiques, bien loin de celle de Dallas et de ses grossiers personnages qui se disputent le contrôle des pétroles Ewing, à coups de bourbons bien tassés et de complots familiaux ourdis à l’occasion d’un barbecue copieusement arrosé au Jack Daniel’s.
Le synopsis pourrait être signé « Restons Correct ! » :
D’abord y’a Henri, jeune et fringant sexagénaire à qui tout paraît avoir réussi depuis sa sortie d’HEC. Des postes d’administrateurs en veux tu en voilà, l’amitié tutélaire de Chirac et les tunes qui vont avec et, pour finir, la prestigieuse présidence d’EDF et des ses dizaines de milliers d’agents statutairement dévoués au grand service public de l’énergie électrique et populaire.
Mais, car il y a un « mais », sous ce vernis brillant se cache un écorché vif, un perpétuel insatisfait qu’aucun thérapeute n’est encore parvenu à guérir des sa boulimie d’honneurs et de (vraie) galette-saucisse.
Ensuite on a Anne, jeune et sémillante quinquagénaire qui est parvenue à la seule force de ses compétences et de son courage à passer du cabinet de Mitterrand - François dit « tonton », pas « l’autre » - à la présidence d’AREVA et des ses mystérieuses marmites nucléaires et publiques.
Mais, car il y a aussi un « mais », derrière ce sourire satisfait se cache un immense besoin de reconnaissance : celui de supplanter un jour Angela Merkel au palmarès Forbes des meufs les plus puissantes du monde.
Comme quoi y’a toujours un espoir : on peut être - ou avoir été - une femme de gôche et nourrir quand même quelques ambitions légitimes…
Enfin y’a François Fillon, le bon copain de la classe, toujours bien coiffé et prêt à arranger les embrouilles, qui espérait bien que ces deux brillants dirigeants de ces deux grandes entreprises publiques auraient suffisamment d’atomes crochus pour être capables d’aller fourguer des EPR aux émirats, au nez et à la barbe de ces gros lourds de Coréens.
Ben c’est raté, c’est plié c’est planté : les dirigeants d’Abu-Dhabi ont beau être plus pétés de tunes que le Comité d’Entreprise d’EDF, z’ont trouvé que deux fois le prix c’était quand même un peu cher pour des réacteurs nucléaires, fussent-ils made in France.
Du coup François s’est pour une fois fâché : Anne et Henri ont juste deux semaines pour arrêter de se tirer la tronche.
En attendant la suite, on se demande pourquoi personne n’a encore pensé à privatiser ces gros machins. Non seulement ça pourrait contribuer à désendetter le pays mais, en plus, ça pourrait pas marcher plus mal…