Autant l'avouer : avant le film de Tavernier, nous n'avions jamais entendu parler de James Lee Burke que son éditeur français (Rivages/Noir) n'hésite pas à comparer à Faulkner (en quatrième page de couverture : ce roman aux accents faulknériens, etc.). Etait-ce pour autant une regrettable lacune ? Non. Certes, le roman dont Tavernier s'est inspiré n'est pas moins intéressant qu'un autre, mais, pour restituer son atmosphère " glauque ", rendre avec finesse l'ambiguïté des différents protagonistes du récit (en particulier le meneur de jeu, Dave Robicheaux, incarné, il est vrai, par Tommy Lee Jones), mener au cordeau une intrigue policière compliquée dont le départ s'opère en deux temps (deux époques, pourrait-on dire) : la découverte d'ossements humains dans le bayou de New Iberia (Louisane du Sud) et du cadavre d'une jeune prostituée du coin, le film suffit. Car si le roman n'est pas moins intéressant qu'un autre, il ne l'est pas davantage non plus. La littérature américaine abonde tant aujourd'hui en livres de ce genre qu'on aurait grand-peine, en définitive, à les distinguer les uns des autres (Richard Millet parle de son côté de "sous-culture dominante" et nous souscrivons sans trop barguigner à ce constat). Saluons cependant un des mérites les moins contestables de Burke : il sait décrire les paysages, les variations météorologiques, les turbulences cycloniques. A défaut d'égaler Faulkner ou les autres grands Sudistes du siècle dernier (Flannery O'Connor, William Goyen, William Styron, Carson McCullers...), le romancier nous incite à conclure que la Lousiane n'est pas un état pour nous. C'est toujours bon à savoir.
Dans la brume électrique - James Lee Burke
Traduit de l'américain par Freddy Michalski
480 p. - Rivages/Noir