La « bonne polémique » c’est « énoncer des propositions contraires aux convictions des intérêts régnants ». C’est l’essence d’une « littérature de combat (…) qui est combattante sans être combative ». Réflexion de Jean-François Revel, 1964, dans l’Express, que me transmet Marc Birobent.
Cependant dans notre ère de « communication de masse », dans laquelle le polémiste « d’aujourd’hui doit se débattre au sein d’un océan de boue qui se referme sans arrêt au dessus de sa tête », « la polémique de fond doit aussi se faire polémique de ton ».
Il est vrai qu’être provoquant permet d’être entendu. (C’était déjà le cas au temps, sans mass media, de Voltaire !) Mais cela sert-il sa cause ? La provocation augmente l’anxiété de survie. Mais elle ne dit pas comment conduire le changement. D’où le succès des « polémistes de droite », les conservateurs, dont on trouve les arguments admirables parce qu’ils justifient qu’il ne faut rien faire.
Jean-François Revel croit pouvoir dire que « malheureusement, dans notre Moyen-âge, notre tête est entrée dans l’ère de la preuve alors que notre cœur est resté dans l’ère de la force et du mensonge ». Erreur. Ce n’est pas notre cœur qui est en tort, mais notre tête : à un moment de notre histoire, elle s’est détachée de la réalité. Ce qui explique qu’elle puisse penser l'ignorer. Car, les « intérêts régnants » assurent l’équilibre de la société. Quand la tête croit pouvoir s’en abstraire, c’est la révolution.
S'il est utile de stimuler l’anxiété de survie de la population, pour réussir un changement sans bain de sang, il faut surtout savoir utiliser ce qui lui est favorable dans la culture de la société.
Compléments :
- Anxiété et changement : Vaincre sa résistance au changement.