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Manipulation de l’information en haut lieu

Publié le 18 janvier 2010 par Jeangagnon

Le secrétaire au Trésor américain, Timothy Geithner, nommé à ce poste par Barack Obama en janvier 2009, aurait demandé que des informations pertinentes aux paiements faits à Goldman Sachs et à une dizaine d’autres grandes banques dans le contexte du sauvetage des banques en novembre 2008 ne soient pas rendus publiquement comme l’exigeait pourtant les règles de la Securities and Exchange Commission (SEC), l’organisme de réglementation des valeurs mobilières aux États-Unis.

L’assureur American International Group (AIG)

Rappelons les événements. American International Group (AIG), qui en 2007 était la plus grosse compagnie d’assurance au monde en terme de capitalisation boursière, était au cœur de l’opération de sauvetage du système financier à cause de son portefeuille d’assurance de crédit (credit default swaps-CDS). Un CDS est une assurance qui garantit le paiement du capital et des intérêts d’un instrument financier au cas où l’emprunteur serait incapable d’effectuer le remboursement.

Le marché des CDS servait d’abord à assurer les obligations des municipalités, mais il s’est ensuite étendu aux obligations des sociétés où il s’est développé de façon exponentielle, permettant à des institutions bancaires de bâtir de gigantesques positions tout en minimisant le risque. Par exemple, Goldman Sachs achetait des obligations de la société ABC qui rapportait 7 % et achetait en même temps un CDS émis par AIG qui lui coûtait 2 %. Ceci lui procurait donc un revenu garanti de 5 %. Goldman Sachs empruntait donc tout l’argent disponible qui coûtait moins de 5 %, et les profits s’accumulaient.

Tous les hedge funds et les autres grandes banques à travers le monde ont utilisé le même stratagème. De son côté, AIG faisait un fortune en émettant les CDS.

Lorsque la crise financière éclata en 2008, il devint rapidement clair qu’AIG n’allait pas avoir les capitaux nécessaires pour rencontrer ses obligations en regard des CDS qu’elle avait vendus. Ceci allait s’avérer évidemment catastrophique pour Goldman Sachs et tous ceux qui détenaient les contreparties des CDS.

C’est AIG qui a reçu les plus grosses sommes du programme de sauvetage du système financier, soit près de 200 milliards. Dans les faits, le gouvernement américain, par son programme de sauvetage, se substituait à AIG afin d’éviter un effet domino qui aurait menacé le système financier.

Paiement préférentiel pour la banque Goldman Sachs

Il appert que certaines banques, dont Goldman Sachs, auraient été favorisées en se faisant payer par IAG avec l’argent du gouvernement la valeur totale de leurs CDS, bien que les marchés indiquaient que ces titres pouvaient être négociés à un escompte important, ce qui aurait diminué les sommes à verser par le gouvernement. On estime que 13 milliards auraient pu être sauvés.

Cette opération de sauvetage a été orchestrée par la Réserve fédérale de New York, l’un des 13 bureaux régionaux de la Réserve fédérale américaine, mais évidemment le plus important. Au moment du sauvetage, Timothy Geithner était le président de la Réserve fédérale de New York. Le secrétaire au trésor était alors Henry Paulson qui avait été auparavant le président de Goldman Sachs.

La Réserve fédérale de New York veut étouffer l’affaire

Dans le cadre du programme de sauvetage, les institutions qui recevaient les fonds devaient divulguer à la SEC comment ils étaient utilisés. En novembre dernier, des courriels émanant de la Fed de New York demandaient délibérément à AIG de ne pas révéler que Goldman et les autres avaient récupéré 100 % de la valeur des CDS. Les courriels ont été obtenus par le député républicain de la Californie, Darrell Issa, qui est aussi un membre influent du Comité du Congrès sur la surveillance et la réforme du gouvernement.

La Réserve fédérale de New York tente de soustraire Timothy Geithner à toute responsabilité en prétendant qu’il s’était déjà éloigné de ce dossier étant donné qu’il était pressenti pour devenir le prochain secrétaire au Trésor. Elle tente aussi de se défendre en expliquant que le système financier était en crise et que le fait de donner trop d’information aurait pu être nuisible.

Le député Issa tentera sûrement de forcer Timothy Geithner à s’expliquer. Ce serait intéressant qu’il réussisse, car le témoignage du secrétaire arriverait à peu près en même temps que l’annonce des boni que toucheront les dirigeants et employés de Goldman Sachs qui viennent de connaître en 2009 une année record.

Au Québec également on a préféré limiter l’information lors de la crise des PCAA. Vous vous rappelez ces placements sécuritaires qui ont coûté 6 milliards à la Caisse de dépôt. J’en fus témoin. Je vous en parle la semaine prochaine.


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