- Vers Hradcany ?, vous étonnerez-vous, amis
lecteurs, après avoir pris connaissance du titre de cet article. Mais en ayant traversé Mala Strana, ajouterez-vous, et gravi Nerudova ulice samedi dernier tout en admirant les maisons baroques et les enseignes si typiques de cette
rue,
nous devrions tout naturellement arriver sur la place du château, non ?
Et vous nous aviez promis ...
- Certes, certes, vous avez entièrement raison : je l'avais ainsi annoncé, oui. Mais, tout bien réfléchi, c'eût été trop simple ; et tellement convenu. Cette remarquable
"voie royale" qu'arpentent les milliers de touristes qui découvrent Prague à longueur d'années ne constitue fort heureusement pas l'unique possibilité d'arriver au château : aussi ai-je pensé
qu'il vous serait peut-être plus agréable d'éviter la foule - nous aurons toujours bien l'occasion de la retrouver devant et à l'intérieur de l'enceinte castrale, soyez-en assurés -, et d'accéder
à l'éperon rocheux, que chapeaute la prestigieuse résidence royale, par l'arrière, par les jardins aménagés au début des années trente du XVIème siècle sur les instances de Ferdinand
Ier de Habsbourg, empereur du Saint-Empire romain germanique.
Aussi, plutôt qu'emprunter le très encombré pont Charles, je vous emmène aujourd'hui un peu plus au nord, par ce pont Cech qu'ornent des allégories de la "Victoire"
brandissant flambeaux,
superbe ouvrage métallique typé "Art nouveau" que nous avions déjà découvert le 5
décembre dernier et qui nous permettra d'atteindre tout à notre aise le pied de la colline de Letna et son métronome.
D'aucuns, parmi vous, se souviendront certainement que j'avais alors expliqué qu'oeuvre de David Cerny, l'imposant engin fut érigé sur ce piédestal après la Révolution de
velours de 1991 qui, comme son nom l'indique poétiquement, vit Tchéquie et Slovaquie définitivement se séparer dans une harmonie peu commune. Se voulant la prégnante métaphore de la faculté
qu'eut la ville de survivre au balancement des différents pouvoirs politiques qui s'y étaient succédé tout au long des siècles et peut-être plus particulièrement au XXème, le métronome
prit aux yeux des Pragois avantageusement la place d'une statue géante de Staline, ce "petit père des peuples"
comme le définissaient jadis les thuriféraires du communime, que Khrouchtchev, après avoir en 1962 vigoureusement dénoncé les crimes de ce sanglant prédécesseur, fit dynamiter.
Ensuite, par une bien agréable promenade à travers parcs et frondaisons surplombant la Vltava et contournant Mala Strana dominée par l'église
Saint-Nicolas,
vue superbe, vous en conviendrez, dont je ne voulais en aucune manière vous priver, nous aurons l'occasion d'admirer quelques bijoux architecturaux, tel ce toit qui, de loin, m'intrigue déjà
:
c'est celui du pavillon Hanavsky, conçu pour l'exposition de 1891 dans un pseudo style néo-baroque assez fantaisiste et qui, de nos jours, abrite un restaurant relativement réputé ...
Mais aussi, à la limite des jardins royaux, le palais d'été, actuellement en réfection, de la reine Anne Jagellon, épouse précisément de ce même Ferdinand Ier que j'évoquais à l'instant.
Edifié au milieu du XVIème siècle, dans le plus pur style Renaissance italienne, tant apprécié en Bohême, par l'architecte et sculpteur Paolo della Stella, il
se caractérise essentiellement par sa toiture carénée en cuivre : elle figure en effet une coque de bateau renversée.
Ou encore ce bâtiment du "Jeu de paume", actuellement salle d'exposition et de concerts,
dont la particularité, aisément remarquable, réside dans la façade entièrement recouverte de sgraffites très différents, vous en conviendrez, de ceux que nous avons rencontrés au palais
Schwarzenberg en décembre dernier.
Cette superbe et reposante promenade - nous ne croiserons, vous verrez, que quelques personnes qui, venant du château, déambulent comme nous dans ces jardins d'agrément, nous serons en réalité les seuls à
l'effectuer en venant de l'esplanade du métronome, sur la colline de Letna -, nous permettra de découvrir la cathédrale Saint-Guy sous un angle quelque peu bucolique tout à fait inhabituel :
fugace impression que les flèches du bâtiment ne sont que la prolongation, dans la pierre, de celles des conifères environnants ...
A l'intérieur de son
enceinte fortifiée, Saint-Guy
semble encore protégée par la vieille tour Mihulka, haute de 44 mètres, jadis tour poudrière et abritant, par la suite, l'atelier d'un fondeur qui réalisa la plus grosse cloche de Prague,
destinée à la cathédrale elle-même ; puis devint le laboratoire des alchimistes de l'empereur Rodolphe II qui tant rêva de pierre philosophale, avant d'être, de nos jours, aménagée en musée
consacré à la Garde du château.
"Satisfait ou remboursé", assène fréquemment la publicité.
Me créditerez-vous, amis lecteurs, d'un satisfecit pour vous avoir amenés paisiblement par le chemin des écoliers, à travers ce parc,
vers la foule grouillante - eh oui, sous couvert d'Histoire, il nous faut bien rejoindre la "civilisation" ... -, qui, devant l'entrée du château, immortalise la fin de la cérémonie de relève de
la Garde ?