Vincent Peillon a fui le débat organisé sur France 2 hier soir alors qu'il avait donné son accord pour y participer. Il aurait dû s'inspirer de l'attitude de François Loncle, député, qui était présent à Evreux au débat organisé par la préfecture. Ce dernier y a déclaré :
« Je précise d'emblée que le parti dont je suis membre et le groupe parlementaire dont je suis vice-président ont vivement déconseillé à tous leurs membres de participer à la série de débats publics organisés dans les départements sur le thème de « l'identité nationale ». Mais je suis personnellement hostile à la politique de la chaise vide : je suis d’avis qu’il ne faut jamais permettre à certaines opinions d’être exprimées sans être contredites sur le fond…
…Dans la Charte européenne des droits fondamentaux dont je fus l'un des quatre rédacteurs français, il est stipulé dès le préambule: « Les peuples de l'Europe, en établissant entre eux une union sans cesse plus étroite, ont décidé de partager un avenir pacifique fondé sur des valeurs communes. Consciente de son patrimoine spirituel et moral, l'Union se fonde sur les valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de liberté, d'égalité et de solidarité; elle repose sur le principe de la démocratie et le principe de l'État de droit. Elle place la personne au cœur de son action en instituant la citoyenneté de l'Union et en créant un espace de liberté, de sécurité et de justice. L'Union contribue à la préservation et au développement de ces valeurs communes dans le respect de la diversité des cultures et des traditions des peuples de l'Europe. »
En somme, faire de l'identité nationale le sujet d'un débat – et pire une valeur – constitue une supercherie. Cette identité n’est aucunement univoque, intangible, éternelle. Elle est polymorphe, pluridimensionnelle; elle se bâtit sans cesse et se modifie en fonction des expériences personnelles et collectives. En vérité, ce débat s’inscrit dans une stratégie globale visant à diviser, à opposer une partie de la population à une autre, à jeter la suspicion et l'opprobre sur certains…
Le Président de la République a clairement révélé sa pensée, le 16 décembre sur Canal Plus, en limitant le débat sur l’identité nationale à la seule question de l’immigration. Il a avoué que l’objectif de ce débat consistait à réfléchir « aux conditions d’intégration des étrangers accueillis dans l’hexagone ». Or, cela ne correspond pas du tout à la vision de la population française qui, d’après un sondage paru dans La Croix (24 novembre 2009), place largement en tête des fondements de l’identité nationale : les droits de l’homme (71%), la langue (68%), le système de protection sociale (62%), la culture (48%) et la laïcité (44%), alors que le rapport à l'étranger et la religion sont secondaires.
D'ailleurs, les Français ne se trompent guère sur la finalité du débat autour de l'identité nationale. Ils ne sont pas dupes. Ils savent pertinemment qu'il s'agit d'une grossière manœuvre politicienne, un vulgaire moyen de détourner l’attention de la population des véritables problèmes du moment, c’est-à-dire la crise économique et financière, le chômage en hausse, le pouvoir d’achat en baisse, la fiscalité de plus en plus inique, la dette publique qui explose, les inégalités de plus en plus criantes, les services publics livrés à une privatisation rampante, la démocratie affectée par le populisme et le déséquilibre institutionnel au profit d’un hyper-président. Les Français n'ont aucun doute sur le caractère intéressé de ce débat qui répond, selon 72% d’entre eux, à des préoccupations exclusivement électoralistes (Le Journal du Dimanche, 26-27 novembre 2009)…»
Voilà ce qu'aurait pu dire Vincent Peillon…