Le monde est une vaste patinoire.
Et les petits êtres de Catherine Scellier s’y aventurent avec témérité. Toujours à la limite du déséquilibre – ils ne sont pas du genre à se laisser tomber- ils évoluent fièrement sur la surface glissante de leur nouvelle vie. Une telle hardiesse ! Et quelle allure !
Ils arrivent sans doute du bout du temps dont ils ont franchi les failles : ils en sont parfois encore tout aplatis…Ils ont dû se frotter aux stratosphères des âges : ils en ont gardé quelques traces de feu…
Et ils avancent. Ils bougent. Comme s’ils avaient compris que le statisme est mortel.
Le mouvement est leur essence.
Ils ont le dynamisme des commencements. L’énergie des naissances. Ou des renaissances.
On a failli d’ailleurs assister à leur mutation. Il n’y a pas si longtemps. D’une matière organique qu’on croyait morte, bois ou os, ont jailli des membres, graciles et un rien puériles. Et puis, de cette matière, a émergé aussi une tête. Le cri primitif demeure encore sur certains visages. Pour d’autres, c’est déjà le sourire de l’apaisement (Catherine Scellier a ses anges de Reims à elle !). La vie s’est extirpée tant bien que mal de la substance inerte. Peut-être avec violence et souffrance. Mais quelle réussite !
Asexuées, hybrides, parfois multicéphales, les créatures de Catherine Scellier sont visiblement en recherche. Elles n’ont pas achevé leur métamorphose. Pas vraiment encore la tête sur les épaules et les pieds sur terre ! Elles ne sont pas parfaites ! Tant mieux ! Elles ne sont pas sérieuses, pas installées, pas réglementées…et c’est ça leur séduction, entre autre ! Elles portent en elles quelque chose de pur, de vrai et de franc. Sans hypocrisie. Sans artifice.
La poésie du balbutiement !
On aime les petits êtres sculptés par Catherine Scellier parce qu’ils sont toutes nos folies refoulées, tous nos cris retenus, toutes nos vies manquées…