Alors que la Cour européenne des droits de l’homme vient de rendre un important arrêt sur la traite de l’être humain (”Lutte contre le trafic d’être humain : “un arrêt phare” pour une sombre affaire (CEDH 7 janvier 2010, Rantsev c. Chypre et Russie)”, CPDH 8 janvier 2010), la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) a adopté un avis le 18 décembre 2009 sur ce même thème qu’elle vient de rendre public.
Cet avis appelle notamment à clarifier et renforcer les mesures normatives, à “ne plus conditionner la délivrance d’un titre de séjour aux victimes étrangères de traite ou d’exploitation à leur coopération, qu’il s’agisse pour elles d’accéder effectivement à la justice ou d’être rétablies dans leurs droits économiques et sociaux” à “renoncer à impliquer les inspecteurs du travail dans la lutte contre l’immigration irrégulière” et à “réfléchir aux liens entre la traite et l’exploitation, les politiques migratoires et la régulation du marché du travail” .
La CNCDH fera paraître un rapport en matière au printemps 2010 à la Documentation française.
Voir l’avis en PDF
A noter que le CREDOF organisera pour sa part une journée d’étude sur cette question le 18 mars 2010.
Information prochainement sur le site du CREDOF : http://credof.u-paris10.fr/
Actualités droits-libertés du 4 janvier 2010 par Véronique Champeil-Desplats
COMMISSION NATIONALE CONSULTATIVE DES DROITS DE L’HOMME
Communiqué de presse - lundi 4 janvier
La Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) a adopté un avis sur la traite et l’exploitation des êtres humains en France.
Au tournant du XXIe siècle, la traite des êtres humains est redevenue un sujet de préoccupation majeure aux niveaux international, régional et national. Plusieurs textes internationaux ayant force contraignante ont été successivement adoptés, en particulier le Protocole des Nations Unies dit de Palerme (2000) et la Convention européenne dite de Varsovie (2005). Alors que le Protocole de Palerme met l’accent sur la répression de la traite, la Convention de Varsovie insiste davantage sur la protection des victimes et la garantie de leurs droits.
Bien que la France ait ratifié l’un et l’autre, «de nombreuses personnes victimes de traite ou d’exploitation accèdent difficilement à la justice et bénéficient rarement de l’accompagnement nécessaire à leur rétablissement, en particulier lorsqu’elles sont étrangères et en situation irrégulière », souligne M. Yves Repiquet, Président de la CNCDH. Il rappelle à cet égard que « la répression de l’immigration irrégulière ne devrait pas remettre en question la protection des étrangers contre la traite et l’exploitation protection qui constitue un droit absolu selon la Convention européenne des droits de l’homme (Recommandation 26) ».
C’est dans ce contexte que la CNCDH a estimé nécessaire de dresser un bilan complet de l’état du dispositif français relatif à la traite et à l’exploitation des êtres humains en France. Entre juin 2007 et décembre 2009, ses membres ont analysé l’ensemble des textes en vigueur et leurs effets s’agissant tant de la sanction des auteurs, que de la protection des victimes ou de la prévention. Acteurs institutionnels, représentants d’ONG spécialisées et de syndicats, juges, avocats, experts, etc. ont été auditionnés ou consultés.
A l’issue de ce travail, une centaine de recommandations regroupées dans un avis, adopté par le 18 décembre 2009, ont été adressées aux pouvoirs publics. La CNCDH appelle, par exemple, à :
- clarifier et compléter la législation pénale en vigueur (Recommandations 3 à 11) ;
- ne plus conditionner la délivrance d’un titre de séjour aux victimes étrangères de traite ou d’exploitation à leur coopération, qu’il s’agisse pour elles d’accéder effectivement à la justice ou d’être rétablies dans leurs droits économiques et sociaux (Recommandations 45 et 66) ;
- renoncer à impliquer les inspecteurs du travail dans la lutte contre l’immigration irrégulière (Recommandations 12 et 80) ;
- réfléchir aux liens entre la traite et l’exploitation, les politiques migratoires et la régulation du marché du travail (Recommandation 87a).
Par cet avis, la CNCDH a souhaité non seulement sensibiliser l’opinion publique mais encore proposer une analyse la plus complète possible d’un sujet complexe en souhaitant que ses conclusions et recommandations, qui seront explicitées en détail dans une Etude à paraître au printemps 2010 à la Documentation Française, puissent nourrir la réflexion engagée au sein du Groupe interministériel sur la traite qui a notamment pour mission d’élaborer un plan national d’action contre la traite des êtres humains.