Nous vivons dans une époque fatiguante, faite de trajets serrés dans des wagons de métros, de réunions sans fin, et de séminaires en costume cravate. Un cycle ultra-raisonnable, plutôt désabusé, qui se met parfois à luire dans l’élan d’une vieille passion. C’est peut être ce sentiment clair-obscur que Massive Attack a chercher à épouser dans son nouvel album “Heligoland” ; une noble intention que de vouloir être à l’image des temps qui courent, mais personnellement ça m’a surtout plongé dans un profond ennui. Sorti sept ans après un « 100th Window » qui m’avait déçu en beauté par son trop-plein d’ambiances dark qui transpiraient la procrastination, ce nouvel album peine à décoller sur la plupart des morceaux. Pourtant le trio de Bristol – devenue duo après la défection de Mushroom sur “Mezzanine” et les différents allés-retours de Daddy G – avait toujours su bien accompagner certaines de mes errances mélancoliques. Et l’annonce d’un cinquième album, lancé en grande pompe, donnait envie de se replonger, malgré tout, dans les infrabasses soyeuses de ces grands artisans du trip-hop.
C’est avec le single Splitting The Atom, sorti à la fin de l’année dernière, que Massive Attack avait signé un joli retour aux affaires. Ce dernier progresse tout en sensualité, porté par la voix suave d’Horace Andy, dont les tonalités viennent éclairer ce titre à la composition plutôt sombre. C’est d’ailleurs avec le vieux chanteur de reggae que Massive Attack réussi vraiment à faire décoller ces morceaux, qui mélangent comme à l’accoutumé basses cold-wave avec rythmiques souls. Girl I Love You, aussi chanté par Horace Andy, reprend peu ou prou la même formule, et dont on notera l’arrivée de cuivre en plein milieu qui nous fait étrangement penser à National Anthem de Radiohead. Paradise Circus permet aussi à Hope Sandoval de sortir de ses volutes folk habituelles pour s’installer ici dans des atmosphères un peu plus enfumées et ensoleillées. Le décollage de Paradise Circus est d’ailleurs plutôt bien amené, finissant avec quelques violons frémissants, qui fonctionnent plutôt bien
Au delà de ces quelques morceaux, on restera plus dubitatif, car si Atlas Air permet à Robert 3D Del Naja d’exprimer sa fibre angoissante en retrouvant les ambiances graves et légèrement noisy d’Inertia Creep, le reste demeure encore loin du pic émotionnel que fut la première écoute de « Mezzanine ». Ces compositions cafardeuses sonnent de façon terriblement ennuyeuse, et donnent l’impression d’entendre un reliquat peu inspiré de chacun des précédents albums de Massive Attack, c’est d’autant plus dommage que la liste d’invités, qui compte Martina Topley-Bird, Damon Albran et Tunde Adebimpe, n’apporte pas grand choses à cette légère débandade qui ronronne tranquillement.
Musique pour notre époque complètement fatiguée et totalement désabusée, à l’image des gens épuisés qui voyagent dans le train … Si c’est cela que Massive Attack cherchait à réaliser, capter l’abattement de notre temps, alors le but est atteint. Personnellement, j’ai envie d’un monde moins vide que cet album, alors voilà si la saison est ennuyeuse, ce disque l’est aussi …
Par Mathieu