Mort de Mano Solo

Mort de Mano Solo hier. C’était un chanteur dont j’ai toujours trouvé la musique insupportable, mais bon, c’est toujours triste, et respectable, un homme qui meurt…
Dans une dernière de ses interviews, il dit qu’il avait été jeté par Warner, la maison de disque. Et bizarrement, il justifiait cela. Disait qu’il trouvait ça normal, de jeter un artiste qui ne vend plus assez. Son dernier album, une auto-production, il en avait vendu 2 800 exemplaires… un fiasco, par rapport à ses anciens chiffres de vente.
Eh ouais, pour vendre 100 000 exemplaires, faut de la grosse artillerie. Mais qui a besoin du vendre 100 000 exemplaires en chantant des bluettes dépressives ? Qui a besoin d’un maître à penser sur trois accords ?
Il crachait sur le MP3 « fabrique de chômeurs «, le téléchargement « qui tue la diversité » (diversité ? chez Warner ?), il trouvait Myspace « pathétique »...
 Il n’avait pas compris que le monde a changé, qu’il y aura de plus en plus d’artistes, qui vendront de moins en moins, parce qu’écrire des chansons, ou écrire des livres, ce n’est pas fait pour gagner des fortunes, ou se payer des appartements dans le VI éme...
C’est fait pour dire, pour parler, pour crier. Parce qu’écrire un livre, ou une chanson, comme disait Deleuze, c’est le seul moment ou l’on peut dire ce que l’on a à dire sans qu’un con vienne vous interrompre avec ses objections à deux balles.
Et puis Schopenhauer a vendu 83 exemplaires de la première édition du Monde comme volonté et comme représentation… Nietzsche a fini dans l’auto-édition. Et Montherlant, Proust ont commencé à compte d’auteur…
Il faut cesser de rêver des rêves minables, des rêves de fric et de gloire, des rêves de Drucker et de PPDA.
Les artistes, les philosophes, les poètes sont là. Tapis dans l’ombre. Les écoutent, ou les lisent ceux qui en sont encore dignes…
Désolé Mano Solo, nous pleurons ta mort (enfin, ceux qui t’appréciaient, et ils semblent nombreux), mais ce monde ne ressemble déjà plus au tien. Plus d’artistes, de livres, de films, de chansons grâce à la technologie, grâce à Internet. Moins de diversité, vraiment ? et alors ?
Moins de démagogie, moins de merdes, moins de paillettes, moins de Beigbeder, moins de Yann Moix, moins de Gavalda et de Darieussecq, moins de stars et moins de commerce… qui s’en plaindrait ?
Musique hier, livres aujourd'hui, le monde change...