Ah que mes amis je souffre dans ma chair en ce moment. Que ça faisait bien longtemps que je n'avais pas connu de telles douleurs, des déchirements de nerfs en feu qui m'arrachent des rictus incontrôlés accompagnés de Aïeuh ! virils en rentrant dans une voiture pour me mettre entre mes deux cousines qui essayent de se pincer les fesses en criant « Makapouf ! » sans se préoccuper de ce que leurs élèves ou maîtres de thèse potentiels diraient en les voyant mais là n'est pas la question, vu que c'est MON blog où je me plains de MES abominables souffrances, et que les puérileries de deux femelles fussent-elles de mon sang n'ont rien à y faire, si ce n'est me permettre des phrases à rallonge et de discrètes moqueries qui n'intéresseront que la famille en même temps y'a que vous qui lisez, non ?
Puis si non, mes lecteurs sont comme de la famille, hein (vous voilà bien flattés, j'espère), donc ça revient au même, pouf pouf.
Mais reprenons. J'étais en train de vous expliquer l'indicibilité de ma souffrance.
Car donc, j'ai mal. En fait, je crois que je fais une allergie articulaire aux pays pas d'chez nous. Mes genoux sont farouchement attachés à leur terre bretonno-lozéro-parisienne et me font régulièrement comprendre, dès que je m'en éloigne, qu'il serait temps de les ramener chez eux, de manière tout à fait française : ils font grève.
Mais je ne me laisse pas intimider.
La première fois, c'était au Québec. Ils m'ont fait la gueule pendant deux-trois semaines après une malheureuse journée en raquettes, et m'ont valu le surnom de Jambay à mon retour.
Puis en Martinique, une pauvre ascension de la montagne Pelée les a de nouveau rendus rétifs, et ils ont refusé de m'accompagner dans la descente. Fourbasses de genoux.
Après ça, je n'ai pas trop voyagé. Je suis bien allé sans encombre à Malte pour un mois, mais c'est parce que ce mois a été rapidement transformé en un week-end.
Puis voilà qu'ils rerâlent. Alors que je les emmenais dans de tout jolis paysages pleins de baobabs et de pélicans, ils se permettent de pas être contents, tout ça parce que je leur ai atterri dessus en faisant une bombe dans quarante centimètres d'eau (ce n'était pas mon but, j'étais persuadé qu'il y avait deux mètres de flotte, et la pente de la plage elle était COMME CA quoi, mais allez expliquer ça à une paire de genoux qui viennent de se prendre 80 kg tombant d'une hauteur de toute façon trop haute).
J'essaye de les consoler, du coup. Je les bichonne. Je les masse au Voltarène® matin et soir en tenue sexy (mon caleçon bleu avec Homer Simpson sur la cuisse gauche), à grands gestes langoureux et sensuels. Je les plains avec ardeur et régularité, je fais leur attaché de presse auprès de la communauté, mais ils ne veulent visiblement rien savoir, ces deux petits salopiauds.
Ils continuent à m'en faire baver à chaque pas, à chaque montée d'escaliers, à chaque entrée et sortie dans le lit. Ca va un peu mieux que les deux premiers jours, quand je devais m'appuyer aux murs pour faire demi-tour dans les chiottes, mais ça fait toujours bobo.
Bon. Au moins, c'est pas tout à fait comme les dernières fois. Avant, c'était les tendons de devant les genoux qui me faisaient morfler et m'empêchaient de me tourner dans mon lit. Maintenant, c'est les tendons de derrière qui tirent dès que je tends les jambes. Un peu de symétrie, ça amène un peu de joie dans la chaumière. Ouais, on se raccroche à ce qu'on peut.