La descente.
Région de l'Annapurna
Étant au point le plus haut du trek (5416 m), on s'imagine bien qu'il faut redescendre. Mais pas à quel point! Le premier village où nous pouvons dormir est 1600 mètres plus bas, au bout d'un chemin émiette-genoux.
La marche n'est plus motivé par l'atteinte d'un objectif ce qui rend la tâche plus difficile. C'est la phase de dépression qui commence officiellement.
Heureusement, la deuxième vallée n'est pas moins jolie. Le paysage, plus aride et inhospitalier, est encore spectaculaire. La neige a quant à elle disparu.
En fin de journée, nous atteignons le village de Muktinath, connu pour son complexe de temples qui est le deuxième plus sacré du Népal. L'endroit attire de nombreux pèlerins hindous et bouddhistes, dont une dizaine qui réside au même endroit que nous.
Le soir venu, j'essaie d'enlever mes bas à la musique des moines qui envahit notre auberge. Le tissu est fusionné avec la plaie de mon ampoule principale - appelons-la Natasha. Nadège (l'infirmière avec qui je voyage) vient à la rescousse et mouille la fibre du bas et la plaie pendant que je tire tranquillement pour libérer Natasha. Elle ne va pas bien, elle est trois couleurs ; rouge, brune et jaune et un liquide s'en échappe. Elle est particulièrement peu séduisante.
Les ampoules de Nad, elles, sont évidemment plus mignonnes. Éparpillées sur les pieds telles de jolies verrues, elles ne sont guère plus grosses que des petits pois et se retrouvent à des endroits toujours plus originaux les uns que les autres (par exemple au bout du petit orteil ou directement en dessous du talon).
On en a vu d'autres. Ça ne nous empêche d'enfiler nos bas croustillants à la texture de papier sablé et de repartir à la conquête de la vallée la vallée la plus profonde au Monde, marchant parfois dans un lit de rivière cinq kilomètres plus bas que les montagnes avoisinantes.
La progression continue tant bien que mal à travers les villages. Peu à peu, on sent la chaleur qui revient et les quelques jeeps et bus déwrenchés nous rappellent qu'on s'approche de plus en plus de la civilisation.
Rendus à Marpha, nous sommes enchantés par le village. Une petite rue en pierre fait office d'allée principale et quelques minces ruelles serpentent dans le flanc de la montagne. Les maisons sont toutes en pierre blanche. Du monastère qui surplombe l'agglomération, on découvre une facette cachée de la vie. Les toits plats des maisons sont entourés d'une clôture en bûche de bois qui coupe le vent. Les gens profitent de cet espace pour capturer la chaleur du soleil en dormant sur une peau de yak ou en vaguant à leurs tâches quotidiennes.
Les derniers jours de marche paraissent de plus en plus longs et l'ultime, lui, est interminable. On y arrive tout de même, épuisé, se disant que « c'est le dernier trek, plus jamais! ».
L'arrivée à Tatopani.
Le village se nomme Tatopani, qui en langue locale veut dire « eau chaude ». Les orangers (ou clémentiniers?) sont garnis à souhait et les poinsettias rayonnent. Au bord de la rivière, nous concluons deux cents kilomètres d'aventure en passant deux après-midi dans des sources d'eau chaude naturelle, détendant nos muscles et ramollissant notre cerveau. Ce dernier devient suffisamment mou pour faire la connexion directe entre le bonheur d'un bon bain chaud et une épreuve physique de deux semaines.
J'ai bien peur que ce ne soit pas le dernier le trek.
Pas à suivre.
-Will.