Au risque de la versatilité, je me ravise finalement pour un nouveau dernier billet.
D’abord pour me livrer à l’exercice des vœux, habituel en ce début d’année, et surtout pour vous confier quelques réflexions, qui me sont venues à l’esprit pendant les congés pris à l’occasion des fêtes de fin d’année, sur ce que nous promet 2010.
Cette volte-face ne m’affecte guère. Il y a quelques mois maintenant que j’ai renoncé à tout espoir de cohésion éditoriale sur ce blog. Depuis que je ne l’alimente plus régulièrement faute de temps, il connaît le sort de toutes les jachères. Il appartient désormais aux friches numériques, aux vestiges d’Internet. Le souci, c’est que ces vestiges numériques, contrairement à leurs homologues antiques, commencent à être tellement nombreux qu’ils doivent perdre de leur intérêt.
Je post-daterai donc le précédent billet annonçant un nouvel entracte pour une durée indéterminée après avoir laissé vivre quelques jours ce nouvel avatar, et le tour sera joué.
Donc :
1/ Je vous souhaite, ainsi qu’à ceux qui vous sont chers, une année 2010 très heureuse. Je vous souhaite surtout que cette nouvelle année vous voie en bonne santé. Portez-vous bien, c’est largement suffisant, le reste suivra pour ceux qui veulent s’en donner la peine.
NB : Je suis conscient que cette dernière remarque peut avoir des relents un peu libéraux aux yeux de certains, mais je l’assume pleinement. Même si je considère que les inégalités se creusent de façon excessive et inconsidérée depuis trois décennies, au risque de mettre en péril un jour notre vie en commun, et qu’il est nécessaire de corriger ces inégalités (thème rabâché encore récemment ici), je reste aussi convaincu de la suprématie de l’économie de marché et du mérite individuel. L’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt ou qui se couchent tard (ou qui ont des insomnies…), en tout cas à ceux qui sacrifient une partie de leur sommeil à leur travail.
2/ Alors, à quoi peut-on s’attendre en 2010 ?
Outre une sortie de crise laborieuse, pour cause d’une part d’effet-retard en termes d’emploi (qui continuera à pâtir de la crise alors que les indices boursiers, CAC 40 en tête, sont à la fête depuis mars dernier grâce à l’abondance de liquidités mises à disposition des croupiers bancaires par les banques centrales) et d’autre part de capacités de production irrémédiablement perdues (sujet déjà évoqué ici), la principale préoccupation pour 2010 concerne à mon avis le risque souverain, i.e. la possibilité pour les Etats de continuer à lever des milliards d’euros (ou de dollars) auprès des investisseurs pour financer des déficits massifs, décuplés par la crise financière et les plans de relance pour en sortir.
2010 sera-t-elle l’année où des Etats feront faillite ? On pense évidemment aux désormais fameux « PIGS » (Portugal, Irlande, Grèce, Spain), mais à voir la situation financière de plusieurs Etats des Etats-Unis, on peut se demander si le risque reste vraiment circonscrit aux pays « Club Med » de l’Union Monétaire Européenne.
« On ne meurt pas de dettes, on meurt de ne plus pouvoir en faire », la citation de Céline (il ne s'est pas toujours fourvoyé) qui sert de based-line à ce blog, sera-t-elle l’antienne de l’année 2010 ?
Avant de figurer en tête de ce blog, cette citation se trouve surtout en exergue de « Ras-le-bol », roman qui, rappelons-le, imaginait en France ce qui se passe actuellement en Grèce : une dégradation du rating de la dette de l’Etat entraîne des difficultés de financement et une hausse du coût de la dette ; cette détérioration des conditions de financement force le gouvernement à prendre des mesures impopulaires, notamment en termes de réduction des dépenses publiques, ce qui a pour effet de jeter la population dans la rue.
Et encore, ça, c’était en 2005, quand on ne parlait pas encore trop des bonus des traders. Alors maintenant, vous imaginez : si le gouvernement, acculé à la rigueur financière sous la pression des marchés financiers, vient expliquer un jour à des millions de salariés et de fonctionnaires qu’il n’a pas d’autre choix que d’augmenter les impôts et de couper dans les dépenses et qu’ils vont devoir se serrer la ceinture, alors que quelques milliers de traders se seront partagés des dizaines de milliards d’euros de bonus grâce à l’excellent cru 2009 sur les marchés financiers, c’est l’émeute assurée.
Pour mémoire, la dernière fois que la dette publique a atteint des sommets en France en temps de paix, c’était en …1788 ! Et à l’époque, c’est pour trouver une solution et sortir de cette montagne de dettes qu’ont été convoqués les Etats Généraux. Avec les suites que tout le monde connaît, qui ont conduit en 1797 à l'annulation des deux tiers de la dette publique.
PS : Je viens de réaliser que le 1er et le 8 mai tombaient un samedi cette année. Un mois de mai sans ponts et sans week-ends prolongés dans un contexte de sujets qui fâchent, du genre réforme des régimes de retraites et plan de rigueur budgétaire, c’est la porte ouverte à toutes les aventures. Il ne manquerait plus qu’il fasse beau temps.
Original post blogged on b2evolution.