Nathaniel Hawthorne, illustré par Kiyoko Sakata
Éditions Naïve
29 pages
Résumé:
Par un froid après-midi d'hiver, deux enfants chaudement emmitouflés jouent dans le jardin sous le regard amusé et attendri de leur mère qui coud près de la fenêtre. Après s'être mutuellement jeté de la neige à la figure, ils échafaudent un grand projet : donner vie à une petite fille, une statue glacée qui serait leur petite sœur de neige... Un conte sur la créativité et le pouvoir d'imagination de l'enfance, capable d'engendrer par sa seule force un monde nouveau. Et toute la modernité d'une jeune artiste japonaise qui, face à un maître de la littérature américaine, met en images, avec magie et élégance, la grâce et l'énergie de la jeunesse.
Mon commentaire:
Nathaniel Hawthorne est essentiellement connu pour son très grand (et magnifique) roman La lettre écarlate. Cependant, il a aussi écrit des contes, des nouvelles, des recueils et d'autres romans. J'ai essayé de trouver des informations sur La petite fille de neige. Je n'ai pas trouvé grand chose, si ce n'est que l'histoire de La petite fille de neige est parue dans un recueil en 1852.
Cet album-ci est d'abord paru en version italienne. Quand on sait que Hawthorne était américain, sur quelle oeuvre originale se base cette traduction? Impossible de trouver des informations sur le sujet. L'album n'en fait pas mention non plus. L'histoire raconte celle de deux enfants qui vont jouer dehors et décident de se créer une petite soeur de neige. L'imagination et la créativité des enfants fait le reste.
Ce texte est très intéressant. On peut y voir plusieurs interprétation. Nathaniel Hawthorne met en scène une famille: Violette et Pivoine sont des enfants plein de créativité et d'imagination; la mère est une femme au foyer qui se donne corps et âme pour sa maisonnée et le père, M. Lindsey, est le parfait père de famille stéréotypé, qui travaille à l'extérieur et représente l'autorité. Les rôles décrits dans le livre sont essentiellement ceux qui étaient habituels dans toutes les familles, à une certaine époque. La mère est une femme effacée, qui se repose sur son mari. Le père représente l'autorité que tous écoutent, même s'il se trompe.
Conte sur l'émerveillement, La petite fille de neige traite aussi de la puissance du rêve, de la magie au quotidien à partir de choses aussi simples qu'un bonhomme de neige. C'est un joli conte au charme un peu vieillot, sur le plaisir du jeu et l'imaginaire puissant des enfants (et de ceux qui, comme la mère, ont gardé une âme d'enfant). À travers l'histoire, Hawthorne ne brosse pas un tableau des plus flatteurs des adultes. Ils sont occupés dans leur monde d'adultes et on perdus la faculté d'imaginer, de croire. Certaines personnes, comme l'incarne la maman de Violette et Pivoine, ont quelque part au fond d'eux cette facilité à rêver et à croire, mais cette faculté est souvent bien loin, enfouie sous le travail et les responsabilités adultes. Certaines personnes, comme le père de famille, ont perdu à jamais leur âme d'enfant.
Le texte est très beau, poétique par moments, très imagé. Les illustrations sont douces et respirent le calme. Elle sont crayonnées, en noir et blanc. La petite fille de neige pourrait être classé comme livre pour enfant, mais je trouve que son message s'adresse principalement aux adultes: emprisonnés dans leur vie sérieuse et ennuyante d'adulte, ils ont oubliés ce qu'était l'enfance et la magie qui en faisait partie au quotidien.
Un très beau livre, qui mérite d'être lu. Il nous fait voir une autre facette de Nathaniel Hawthorne.
Quelques extraits:
"Le caractère de la mère, en revanche, recelait une fibre poétique, un trait de beauté céleste: une fleur délicate couverte de rosée, pourrait-on dire, qui avait survécu à sa jeunesse imaginative, et se maintenant toujours en vie parmi les poussiéreuses réalités du mariage et de la maternité."
"En conséquence de quoi, la bonne dame emmitoufla ses chéris dans des vestes de laine et des manteaux molletonnés, leur enroula des écharpes autour du cou, enfila une paire de guêtres rayées sur chaque petite paire de jambes, sans oublier des moufles de feutre pour leurs mains, et donna un baiser à chacun pour conjurer la morsure du Général Hiver."
"Ma chère épouse, répliqua le mari en riant de bon coeur, vous êtes aussi puérile que Vilotte et Pivoine.
Et en un sens, elle l'était, car toute sa vie elle avait conservé un coeur empli de simplicité et de foi enfantines, pur et clair comme le cristal; et à regarder toute chose à travers ce prisme limpide, elle percevait parfois des vérités si profondes que les autres s'en gaussaient, ne voyant là que sottises et absurdités."
"La mère, entre-temps, était partie chercher le châle et les bas, car sa vision des choses, si subtiles et si délicate, avait cédé, comme toujours, devant le matérialisme opiniâtre de son mari."
"Voilà, comme vous l'aurez remarqué, l'un de ces cas rares, mais pas exceptionnels, où le bon sens est pris en défaut. La remarquable histoire de la petite fille de neige, bien que les personnes sagaces telles que le bon M. Lindsey soient enclines à n'y voir qu'un enfantillage, peut néanmoins susciter des morales variées, pour leur plus grande édification."