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C'était un jour comme tant d'autres. J'étais ce que l'on appelle un travailleur précaire de 24 ans en 2000 . Par conséquent je consacrais mes journées à faire la tournée des grands ducs du chômeur. Démarcher chaque agence d'intérim, demander si elles ont quelque chose pour moi, genre du travail et puis le salaire qui va bien avec ensuite se retirer tel un prince en lancant " Bon, si j'ai quelque chose, je vous rappelle". Ne pas oublier de respirer toutes les 5 tentatives.Ma chasse au trésor n'avait encore rien donné ce jour là . Il me restait 30 minutes pour rentrer chez moi à pinces parce que pas de sous pour le bus, le temps de faire une nouvelle fois l'inventaire de ce qui me restait en caisse, c'est à dire ce qui dormais au fond de ma poche plus le découvert autorisé par un banquier" trop sympa." Je ne pourrais pas encore m'acheter du Saint Simon cette année.
A ce moment là le téléphone sonna. Je composais ma voix la plus Room Service que j'avais en stock et décrochais en me demandant quel boulot j'allais encore dégoter cette fois ci, inventoriste, agent de suveillance, agent de production ......?
"Bonjour ici le secrétariat de la Préfecture de Région vous êtes bien Mr ( le communication se brouilla un instant et je ne puis vous retranscrire ce nom que je me contentais de reconnaitre) je vous passe le Directeur de Cabinet ...."
" Bonjour. Mr Duvaldesprey, Directeur de Cabinet du Préfêt je vous appelle de la voiture... "
"............"
" Oui c'est votre responsable fédéral qui m'a donne votre numéro. Il m'a dit que vous vous chargiez du colloque . Je souhaitais savoir combien de places d'invités vous souhaiteriez avoir pour le Discours du Premier Ministre Mr Jospin."
Je dois un mot d'explication au lecteur. J'étais alors, en plus de chômeur, militant dans un grand et beau mouvement de Jeunesse Socialiste qui aspirait à la transformation sociale. Le Directeur me disait "chargé du colloque" avec dans la voix la gravité qu'on accorde à qui possède bureau et fenêtres. Je n'osais pas lui dire que je m'étais souvent aussi chargé de la colle pour les affichages sauvages et que pour ce qui était du local il n'avait jamais vu la lumière. Mais bon .
D'ailleurs je dois avouer que je me suis coulé dans un rôle. Je me retrouvais presque à tu et à toi avec Mr Duvaldesprey, à discuter le bout de gras. Lionel Jospin venait chez nous s'exprimer à propos
"Construction Européenne, Bilan et Perspective"
dans le cadre de la Présidence Française pour 6 mois de Janvier à Juin 2000 qui allait produire le si fameux Traité De Nice
Il avait besoin de public captifvé. Le jeune militant ferait l'affaire. C'est bibi qui devait lui remplir la salle, enfin participer.
On s'est quitté après avoir conversé amicalement au point qu'il m'ait glissé " il faudra comme même qu'on fasse en sorte de se voir autrement qu'au téléphone ".
J'étai bien d'accord. Le Dircab ( oui je l'appelais par son petit nom) et moi on était so pote. J'avais juste oublié de lui proposer une carte du Parti mais il ne faut jamais conclure la première fois .
En tout cas j'étais http://www.youtube.com/watch?v=hQauP3VizI0
C'est à cette instant là que ma paire de Converse se vautra dans la flaque d'eau. Une flaque où on aurait pu planquer le Clémenceau et où mes pompes venaient de rendre l'âme. Il me restais encore à rentrer chez moi .
C'est à cette instant là je crois que je sus définitivement que c'était trop de la balle le militantisme.
Parce que je ne connais rien d'autre qui permette en un instant de cotoyer sommets et flaques d'eau