Magazine Musique
Un aprem dans le métro à Bastille. Avec Cyril on marche pour faire le changement et on passe devant un mec assis dans un coin avec sa guitare. Immédiatement sa voix nous arrête. Elle se marie parfaitement avec l'acoustique de sa guitare. C'est un grand renoi avec des dreadlocks et un regard fatigué, usé par le temps et presque mélancolique. Ses paroles sont dures "This song is against the system" me dira t'il. Il a l'air sympathique, sans même avoir besoin de sourire. On sent que ce mec est sincère. Il fait "vrai".
Il s'appelle Steve Wilks et à première vue on dirait un énième sosie de Bob Marley, sauf qu'après écoute de son album, je peux dire qu'il est bien plus que ça.
Devant lui sont alignés certains de ses albums, au moins six ou sept. Autoproduits (il a fondé son propre label Wontstop Records), il les vend 10 euros.
On lui en achète un, celui des "love songs", le seul d'ailleurs, parmi des albums engagés politiquement et plus sombres, qui pronent l'amour du prochain et dénoncent les méfaits du fric et de la soif de pouvoir. Dans l'un d'entre eux, il parle de la solitude, de son désarroi, du fait qu'il ne puisse compter que sur lui même.
L'album pour lequel on a opté s'appelle "Build A Sofa". Les paroles sont simples, mais rappellent ce genre de messages essentiels qu'on a trop souvent tendance à oublier. Et le timbre de voix reggae est appaisant.
Sur son site web on peut écouter gratuitement chacun de ses albums.
Voici le player de l'album qu'on a acheté:
Comme on pouvait le deviner à son accent, il est d'origine jamaïcaine par son père. Et anglais par sa mère. Il a grandi dans la banlieue de Bristol au milieu de huit frères et soeurs. Toute son enfance a été bercée par la soul, le reggae et toute cette musique jamaïcaine qu'il entendait du matin au soir dans le café que tenait son père. Et comme il dit très justement "ghetto people always listen to the best music of the time".
Le déclic pour la musique, il l'a eu devant Wild Style, un film avec Grandmaster Flash, quand il avait 12 ans. S'ensuit un parcours initiatique à la redécouverte de ses origines en jamaïque, puis plusieurs années à New York, chez une tante dans le Bronx, où il passe son temps à savourer ses artistes favoris sur les ondes "i loved to listen to red alert and tony humphries on kiss fm 98.7 it felt so cool". En parallèle, toujours animé de cette rage de vaincre, il suit des cours de boxe. Mais la musique le rattrape et il écrit sa première chanson pour sa soeur qui est junkie. Il en écrit alors beaucoup d'autres, achète du matériel grâce à des petites magouilles. Et un jour se fait remarquer par un mec de chez EMI. Ce jour là il comprend que sa vie c'est la musique, que c'est de ça qu'il veut vivre, et pas en étant une petite frappe de rue.
Pour éviter la prison il bosse dans le café de son père et continue d'écrire sur la misère, sur les "citoyens de seconde zone" que lui et ses pairs sont.
Mais il affirme que ce qui l'a empêché de percer et ce pourquoi il se bat aujourd'hui, c'est le racisme des majors britanniques. "music buissness in the uk opened my eyes to the racist way england is like ub40 the biggest reggae band in the world and they are WHITE and dont write their own songs!" Sans parler de l'incompétence "the problem with the music buissness is that the people who control it dont even love music not even like it"
Désabusé mais pas à court de rêves, Steve Wilks continue de faire ce qu'il appelle sa musique du ghetto. En espérant qu'un jour les "babylon boys" comprennent...
Peace. Love. Jah.