Pas question pour moi de faire un nième éloge funèbre de Philippe Seguin,
d'autres l’ont
déjà fait beaucoup mieux que
je n’aurais pu le faire !
Pas question non plus de faire un panégyrique tardif de quelqu’un que je
regretterai mais avec lequel je n’ai pas toujours été d’accord.
Pas question enfin de me lancer dans sa biographie, Monsieur Wikipédia fait
ça très bien !
Non, juste quelques mots pour essayer de préciser les souvenirs que je
garderai du bonhomme.
Il me laissera l’image d’un homme rond sans être débonnaire, droit sans être
rigide, plutôt austère sans être sinistre, fort en gueule sans l’ouvrir à tous
bouts de champs, d’un homme d’Etat mais pas d’un politique et surtout d’un
homme d’une grande indépendance d’esprit !
Par contre, son parcours politique me laisse une impression d’inachevée
voire une certaine frustration qu’il n’ait pas été plus à la hauteur de
l’homme. J’aurais aimé qu’il ait pu en faire plus pour ce pays. Est-ce son
caractère, son positionnement un peu marginal au sein du RPR, un manque
d’ambition ou une certaine maladresse politique telle que celle qu’il a
manifesté alors qu’il briguait la Mairie de Paris ou lorsqu’il s’est acoquiné
dans une alliance improbable avec Pasqua, je ne sais pas, mais j’ai le
sentiment d’un talent gâché !
C’est peut-être dans la dernière partie de sa vie, en tant que Président de
la Cour des Comptes que j’ai le plus apprécié ses prestations. Il a réussi à
donner à cette institution un élan, un poids dans la vie politique française
qu’elle n’avait pas eu depuis 200 ans qu’elle existe !
J’ai eu plusieurs fois l’occasion d’évoquer les rapports et études de la
Cour des comptes portés par son président !
Un président qui ne mâchait pas ses mots et dont les formules de synthèse
donnaient à ces rapports pour le moins austères une force, une puissance,
directement proportionnelle à celle du personnage !
Son dernier coup d’éclat en la matière fut cette étude de la Cour des
comptes sur l'évolution des effectifs de l'Etat entre 1980 et 2008 qui fut
l’occasion pour Philippe Seguin d’asséner à nos gouvernants quelques vérités
qu’il était le seul à pouvoir exprimer aussi vertement : « Les
effectifs s'ajustent très peu à la baisse de la demande ou des besoins mais
sont au contraire très réactifs aux nouvelles sollicitations. C'est comme un
yo-yo qui ne cesserait de monter et ne descendrait jamais » ou encore
« Comment montrer à nos concitoyens qu'une politique est devenue
prioritaire? En embauchant des fonctionnaires à tour de bras ! »…qui
maintenant pourra dire tout ça aussi haut et aussi fort ...qui ?
Je sais bien que personne n'est indispensable, mais lui, dans sa fonction, il était juste nécessaire !