Les usages sociaux actuels poussent, en début d'année, à
formuler voeux de bonheur, de prospérité et plus généralement de toute évolution de situation pouvant combler quelques attentes de nos proches.
Il serait à craindre que ces souhaits risquent d'être inefficaces, car croire qu'il puisse sufffire de dire la chose pour qu'elle soit reviendrait à se prendre pour Dieu lorque son réveil sonna
pour la première fois au début de la fabuleuse semaine dont divers mythes décrivent le déroulement.
Une question utilitaire pourrait être que puis-je faire pour que ces voeux se réalisent tels que je les formule ? Une autre pourrait s'énoncer quelle est l'utilité de ces invocations
rituelles ?
Mais sommes-nous dans le domaine bien borné de l'utilité raisonnable ? Ou dans l'espace mystérieusement déformable des intention cordiales ?
Après tout, ouvrir une fois par an son carnet d'adresses pour lancer un petit signal vers celles et ceux dont nous avons soigneusement mis en mémoire nom et adresse , et plus si affinités ,n'est
pas a priori une mauvaise idée.
Le commerce de la carte de voeux est florissant, même si, comme le muguet du premier mai ou les pétards du quatorze juillet, il y a tout de même de la morte-saison - qui, comme chacun sait, est la saison où la terre ne produit rien...-. dans ce genre de commerce. La carte 2.0
s'expédie via Internet, et même si les battements d'ailes des anges qui papillonnent autour du sapin supernova semblent aérodynamiquement
inefficaces, elle arrive tout de même à destination.
Cette tradition remonterait aux romains - ils sont fous...- et les strenae étaient dit-on de petits cadeaux donnés aux amis pour leur souhaiter une heureuse nouvelle année. Pour
Benoist & Goelzer, un strena est un présage, et par extension un présent fait pour servir de bon présage. Pour Felix - qui potuit ? (*) -Gaffiot, c'est un pronostic, un signe, et par généralisation un présent fait un jour de fête. A noter la proximité lexicographique avec
Strenia, la déesse de la bonne santé...Un rapport entre les deux ? Eh bien, selon mes sources, la Befana italienne, qui apporte ses présents la nuit de
l'épiphanie, aurait dans son ascendance une fête romaine, qui se déroulait au début de l'année en l'honneur de la déesse Strenia.
Chez les grecs zanciens, les étrennes étaient τας ξενίοις, sans lien évident avec le présage, τὸ οὶώνισμα.
Sur ce, Ευτυχισμένο το Νέο Έτος !
Crédits : Merci à Goscinny et à Uderzo, pour cette évocation de la folie romaine, pas si mentale que ça ...et à Carmen Lia Leuzzi,
qui a proposé sur Viadeo le texte du titre, comme énigme à résoudre, car translittéré en code ASCII...
(*) cette apposition n'est pas une réminescence de certaines chansons de Renaud, mais un hommage à Goscinny et à Uderzo, dont les pirates
n'hésitent pas à pirater le fameux Felix qui potuit rerum cognoscere causas (... atque metus omnis et inexorabile fatum subiecit pedibus strepitumque Acheruntis auari !) ou
autrement dit Heureux qui a su connaître les lois des choses, terrasser toutes les peurs, l'intraitable destin, le tapage de l'Achéron vorace ! [ Virgile in Géorgiques, II - 490 à 493 ]