Le pyjama

Par Jfjeanne1957


Pourquoi ce titre? Dans la préface, Daninos avance cette explication:
"S'il ne coule pas de source, ce titre s'inscrit (tout s'inscrit aujourd'hui) dans une certaine logique intimiste dont le livre fait état. J'irai plus loin encore (tout le monde y va aussi) en disant que le pyjama est un ascenseur qui monte sans cesse du passé au présent… un ascenseur fou où j'ai rencontré une mort dont je suis revenu - et une vie dont je ne reviens pas."

Plus loin dans l'ouvrage, Daninos décrira, à l'époque où il n'était pas devenu une célébrité, la réprobation muette de sa concierge quand elle le découvrait encore en pyjama à midi.

Organisé de façon chronologique, le livre commence par l'évocation des débuts de l'auteur comme journaliste dans Tennis et Golf, une revue dirigée par son oncle et dont le tirage ne dépassait pas les 1500 exemplaires:

C'est par la petite porte que j'ai fait mon entrée dans le journalisme. Porte de service s'il en est, puisqu'il s'agissait de tennis.

Il en profite pour tordre le cou à la légende des chiens écrasés, rubrique qui n'a jamais existé et dont portant on fait un passage obligé: "il a commencé par les chiens écrasés!"

Viennent ensuite les souvenirs de guerre, la mobilisation (qu'il voyait comme un désagrément qui n'allait pas durer plus de quinze jours), Dunkerque, l'arrivée à Londres puis, sur un coup de tête, le départ à Rio:

Ah!... je le dis comme je le pense, ou plutôt comme je l'ai vu: que la guerre était drôle à Rio!

Je n'oserais évidemment pas écrire cela si j'y étais resté – pas à la guerre, à Rio – mais, ayant eu l'idée saugrenue de regagner le France en pleine guerre, après avoir mis mon instinct de conservation à la consigne, je me sens plus à l'aise pour l'écrire.

Une idée saugrenue, mais une excellent raison, il était amoureux…

Le cœur de l'ouvrage est consacré à la naissance du major Thompson, au succès venant après des années de vaches maigres que Daninos illustre par l'anecdote suivante:

Au temps où mes livres ne marchaient pas, je me trouvai, dans le brouhaha d'un cocktail, derrière deux invités qui prononçaient mon nom.

- Tiens... y a Daninos qui doit venir tout à l'heure…

- Lequel? Celui qui fait de la littérature ou celui qui a réussi? (1)

Le terrible accident de voiture qui a failli lui coûter la vie donne lieu à des pages d'un humour très "british", fait de distance et d'élégance:

La rencontre la plus mémorable de ma vie, celle qui m'a laissé dans la chair les marques les plus profondes, et mis mon cœur dans un émoi à nul autre pareil – je l'ai faite, une nuit de printemps, lorsque la fatalité me réserva un face à face avec la mort en général.

Un général que je ne connaissais pas.

Un général qui roulait à contre sens sur l'autoroute du sud et dont Daninos écrit encore:

Je ne puis avoir pour le général et son souvenir qu'une sympathie très grande. Pour une fois qu'il y en a un qui ne meurt pas dans son lit!

Délicieux antimilitarisme non primaire qui fait écho à une autre réflexion (dans le Veuf Joyeux):

Une mort vraiment extraordinaire, par exemple celle d'un général au combat…

Le livre se prolonge par une réflexion sur l'humour (sans doute la question qu'il a le plus entendue: Pierre Daninos, dites-nous, qu'est-ce que l'humour?) et se termine par cette citation de l'essayiste et philosophe américain Elbert Hubbard:

Ne prenez jamais la vie trop au sérieux; de toute façon vous n'en sortirez pas vivant.