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J'ai une tendresse particulière pour Gustave Flaubert. Il m'a valu, grâce à son Education sentimentale un 16 au Bac de français, enseigné par un professeur pour lequel j'avais, dirons-nous, éprouvé plus qu'un intérêt littéraire. Et puis il a écrit Madame Bovary qui reste encore aujourd'hui le livre qui m'a le plus ému.
"La ravissante Emma Bovary passe ses longues journées à rêver à des jours meilleurs. Mariée à un médecin de campagne, elle se morfond dans la routine morne et sans surprise. Quand elle tombe sous le charme d'un séduisant aristocrate, elle est prête à tout abandonner pour décrocher ce qu'elle pense..." être le grand amour.
Le roman de Gustave Flaubert a fait l'objet de nombreuses critiques à l'époque de sa publication. Emma Bovary fait preuve d'une intolérable liberté pour la bourgeoise de province qu'elle est, Flaubert transgresse le non-dit.
Oeuvre réaliste, exécutée de main de maître, comme le souligne Georges Sand, le roman fait sensation. Il ne va pas à l'encontre de la morale parce qu'il dénonce la propension qu'ont certaines femmes de province à se laisser aller aux "appétits de luxe, de fausse poésie et de fausse passion que développent les éducations mal assorties à l'existence future, inévitable."
"La leçon sera-t-elle aussi utile aux maris imbéciles, aux amants frivoles, aux bourgeois prétentieux, à toutes les caricatures provinciales si hardiment dessinées par M. Flaubert ? Hélas non ! Madame Bovary est seule intelligente au milieu de cette réunion de crétins".
La magie de Madame Bovary (que j'imagine toujours sous les traits d'Isabelle Huppert qui l'incarnait si talentueusement au cinéma), c'est de pouvoir résonner encore juste aujourd'hui. Contexte social au combien différent pour les femmes mais problématiques universelles. On ne s'aime plus, on se sépare, répondrez-vous. Mais la passion amoureuse reste un questionnement dans notre société où la monogamie est toujours de rigueur. Le système a ses limites, ses petits arrangements, mais on a pas trouvé mieux ! L'amour dure 3 ans écrit Frédéric Beigbeder. Les petites filles rêvent toujours du prince charmant qui ressemble davantage à Brad Pit qu'au professeur Tournesol.
C'est ainsi que Madame Bovary m'a charmé, répondant à la fois à mon penchant un peu prononcé pour les situations et les êtres pathétiques, et attisant une sorte de dialogue intérieur à un moment où l'on s'interroge sur son avenir amoureux.
Je rapprocherais bien volontiers, mais cela a dû être fait, Madame Bovary de la très Belle du Seigneur, d'Albert Cohen, qui reste mon autre roman fétiche.