Il est communément admis que le fan indie-pop norvégien n’a pas de sens externes apparents, qu'il forme une masse homogène, et qu'il est totalement refermé sur lui-même. Cependant, tout recroquevillé est-il, le fan indie-pop norvégien est curieusement sensible aux mêmes impressions sensorielles que peut éprouver l'admirateur extraverti de rock graisseux le plus commun qui soit (le fan de Motörhead ?). Il s’alimente ; il se meut (en lui) ; est même sensible à la lumière, du moins à certains rayons ; le milieu où il vit en perpétuel repli sur lui-même est sans cesse traversé par des ondes sonores et il réagit sans doute à ces ondes sonores. Peut-être même possède-t-il, sous cette absence de sens externes apparents des sens qui nous manquent et que nous ne pourrions retrouver que par l’étude et l'analyse, tel le sens de l'introspection, cette « chimie intime » qui juge de la composition d’une âme.
Tout ça pour vous dire que les Low Frequency in Stereo sont Norvégiens et qu'ils ont tout pour réjouir le fan indie-pop qui passe, que la « chimie intime » est bien là, mais discrète la « chimie intime », en catimini...
Voyons voir et analysons, c'est le quatrième album de nos « basses fréquences en stéréo », leur meilleur pour l’instant, un concentré d’indie-pop (donc), un peu moins lo-fi que leurs précédents, plus étoffé quoi, parfois des instrumentaux limites post-rock et des bidules proche de Stereolab, mais le plus souvent des « chansons » qui tournent autour de tout ce qui c’est fait de mieux entre 1974 et 1982 ; soit la tentation krautrock , Can pour l'excentricité, Neu! pour la répétition ; soit le post-punk et la new-wave de Joy Division aux B’52 en passant par le premier Feelies (il n’est pas ici question de niveau, mais d’inspiration, nos Norvégiens sont en dessous) bref, et en gros, tout ce qui était un peu raide, et futé, à la « fracture » seventies-eighties...
Le fan de Motörhead « extraverti » trouvera cette raideur fracturée peu à son goût : « un machin morne pour endives blafardes ! » ce faisant il passera à côté d’un disque, qui à défaut de génie et outre la raideur, recèle un charme certain ; il passera à côté d’un Wurlitzer circonspect, d’un Farfisa pas bégueule, d’un Hammond B-3 moins liturgique que ma main droite et même à côté d’une basse alternativement lourde et sautillante, d’un sitar, d’une trompette et de deux voix fille-garçon qui se jaugent puis ce juxtaposent pour mieux se mêler dans un petit maelström indie-érotique...
Voilà, voilà.